samedi 8 janvier 2011

Zombi 3

 Aujourd’hui, on aborde un poids lourd du film de morts vivants. Et pas parce que le film a su marquer de son empreinte indélébile le visage en putréfaction de nos créatures en décomposition préférées, mais parce qu’il est réalisé par un prince du genre, Bruno Mattei, l’homme qui ne tourna que des films bis ! Mais réduire la folie ambiante au seul maître du bis italien serait regrettable. D’abord confié à Lucio Fulci, maître de l’horreur italien à la carrière prestigieuse mais moins flatteuse que celle d’un Dario Argento, « Zombi «3 » a connu une mise en chantier aussi chaotique que les affrontements qu’il présente. Pour la sortie européenne de « Dawn of the Dead », en partie financé par Fulci justement, le film de Romero avait été retitré « Zombie ».  Lucio réalisa par la suite « Zombi 2 », ou « Zombies Flesh Eaters », ou « L’Enfer Des Zombies », qui n’entretient qu’un point commun avec le film américain, la présence de mort vivant. Malgré cette parenté discutable, « L’Enfer Des Zombies » est considéré comme un classique du cinéma gore transalpin, grâce à des maquillages d’un réalisme perturbant, mais aussi à quelques scènes inoubliables. Entre un duel zombie/requin et une ambiance glauque proche du cauchemar, Fulci avait réellement apposé sa marque au genre.


Pas étonnant qu’on ait demandé à Fulci de remettre le couvert après un tel résultat. Mais le tournage va vite prendre une allure aussi cauchemardesque que le climax de « Zombi 2 », les problèmes s’accumulant. Fulci, déjà malade au moment du tournage, va voir son état empirer à cause du climat des philippines, et au moment où il quittera le tournage, les producteurs jugeront que le résultat n’est pas suffisant, ou pas assez bon pour monter un film entier. Si l’on en croit les propos de Bruno Mattei, l’un des deux réalisateurs de substitution (le second étant le scénariste Claudio Fragasso, à qui l’on doit « Troll 2 » entre autres), Fulci aurait tourné environ 70 minutes, dont 50 minutes auraient été intégrées au montage final, raison pour laquelle il déclare considérer « Zombi 3 » comme un film de Lucio fulci, plutôt que comme une de ses propres réalisations. Pourtant, difficile de retrouver la patte du maître, à l’exception de quelques scènes baignant dans une atmosphère poisseuse, et mises en valeur par un travail approfondi sur la lumière et l’utilisation de la fumée. S’il est réellement responsable de plus de la moitié du métrage, on peut imaginer que son état de santé ne lui a pas permis de travailler avec autant de sérieux que dans d’autres circonstances, et il serait bien dommage de se rappeler de son travail en se basant sur ce divertissement.

En effet, le résultat est inégal et sans réelle ambition. A noter d’ailleurs la disparition du « e » de zombie dans le titre, suite à des problèmes d’exploitation de la licence pour d’obscures histoires de droits… ou de réputation peut-être ? Toujours est-il qu’on tient ici un nanar énergique plutôt qu’une merveille d’atmosphère à l’horreur prégnante. L’ennui ne sera malgré tout jamais présent, grâce à un succession de scènes d’action amusantes, et quelques idées bis qui fonctionnent bien, ou du moins qui font rire. Pour commencer, que ceux qui restent persuadés que les zombies sprinteurs sont apparus dans les années 2000 se jettent sur ce spécimen. On y trouve les morts vivants les plus agressifs du cinéma, qui collent des droites monumentales à leurs adversaires lors de combats à la chorégraphie totalement fantaisiste. C’est bien simple, on s’attend presque à voir la tête de nos héros se dévisser. Mais les morts-vivants (car il ne s’agit pas d’infectés même s’ils courent) ne sont pas les seuls à réclamer de la chair, même les animaux s’y mettent pour des séquences d’anthologie aux effets spéciaux à couper le souffle de quiconque n’aurait jamais allumé une télévision lors des cinquante dernières années. L’attaque des oiseaux zombies préfigure d’ailleurs le « Killing Birds », aussi connu sous le titre « Zombi 5 » de Claudio Lattanzi.



Le rythme est plutôt satisfaisant, l’intrigue démarre vite, et des coïncidences bienvenues comme la découverte d’une caisse remplie d’armes et de munitions dans un hôtel vont permettre à nos héros de dézinguer du zombie, chose que tout fan attend ardemment. Quand en plus, les héros en question sont l’objet d’une direction d’acteur sous amphétamines, il y a franchement de quoi se réjouir. Difficile en effet de prendre au sérieux l’intrigue, les dialogues, ou le jeu des interprètes. Mais après tout, une fois qu’on a accepté l’idée qu’on visionne un film dans l’esprit Mattei plutôt qu’un conte horrible à l’atmosphère Fulci, on peut tout à fait se laisser prendre au jeu, l’énergie dégagée étant communicative. Et même si les affrontements ne sont pas aussi nombreux qu’on aurait pu le croire, il y a bien plus d’action que dans beaucoup de petites productions mettant en scène des morts-vivants ou des infectés ces dernières années.

Tournage aux philippines oblige, les décors naturels sont très beaux, et les décors en intérieurs très peu nombreux. Les figurants sont également assez peu nombreux (certaines décédant d’ailleurs à plusieurs reprises), et on sent que le budget n’a pas été astronomique, ce qui n’empêche pas l’ami Mattei de nous coller des têtes de zombies qui volent en dehors des réfrigérateurs (Fulci revendique l’idée de cette scène, pourtant elle semble bien moins en phase avec son cinéma qu’avec celui plus délirant de Mattei). Le film ne regorge pas de trouvaillse, et difficile de prendre tant de bisseries au sérieux, mais le divertissement est là. « Zombi 3 » est un film fun, bourré d’action et de zombies énervés. Si vous n’êtes pas trop exigeant et n’êtes pas à la recherche d’une forme d’art aussi expérimentale que sophistiquée, vous trouverez largement votre compte !

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