vendredi 30 juillet 2010

ma théorie (résumée grossièrement) sur Inception: spoilers en vue

http://www.youtube.com/watch?v=q4XxaWXsO78&feature=related (A écouter en lisant)

Au delà du jugement qu'on peut porter sur le film, Je trouve deux grandes qualités à Inception : sa propension à nous donner envie de théoriser sur son contenu, et le fait qu’il pousse à s’intéresser à d’autres œuvres aux thématiques proches.

Aujourd’hui, je vais me concentrer sur la première de ces caractéristiques. A la fin du film, la question était avant tout de savoir si la toupie allait cesser de tourner ou non. On pouvait en déduire au choix que le héros avait réussi sa mission, ou bien qu’il était resté dans les limbes. Avant de me lancer dans la lecture des théories du net, j’ai voulu remettre l’intrigue en perspective et tirer mes conclusions.

Voilà les éléments qui m’ont paru importants : pour commencer, « Inception » est clairement le petit frère de « Memento » : la narration déstructurée est proche, mais surtout on a affaire dans les deux cas à un protagoniste et donc un narrateur qui n’est pas fiable. Léonard Shelby n’avait plus de mémoire immédiate et modifiait, consciemment ou non, les éléments de son passé. Dom Cobb éprouve toutes les difficultés du monde à savoir s’il se trouve ou non dans un rêve.

Ce qui nous amène à un point primordial : l’une des règles du monde des rêves est qu’il est primordial d’avoir un totem, un objet personnel dont les caractéristiques précises permettent de distinguer le réel du rêve. Lorsqu’Arthur montre son totem à Ariadne, il lui précise qu’il est indispensable que personne ne touche un totem qui n’est pas le sien, au risque d’en corrompre les effets. Or, la toupie n’est pas le totem de Cobb, mais celui de sa femme. Même si elle tourne, comment envisager, dans ces conditions, qu’elle soit un indicateur fiable. Dès lors, il est inutile de s’intéresser au mouvement de cet objet.


Je ne pense pas que l’ensemble du film se déroule dans un rêve. Je pense par contre que la cible de l’inception est bien Cobb. Le commanditaire est certainement son beau-père, qui lui demande de « revenir à la réalité » et l’accuse de n’être là que virtuellement pour ses enfants, par l’intermédiaire des cadeaux qu’il leur fait passer. Au-delà de la situation légale du personnage, il semble que ce soit le fardeau des remords face à la mort de son épouse qui entrave son retour auprès des siens. La mission a pour objectif, en surface de manipuler Fischer. Mais elle aboutit finalement à deux choses : la plus évidente est de faire comprendre à Cobb qu’il doit laisser partir le souvenir de sa femme. Qu’il lui ait implanté l’idée ou non, c’est le voyage dans les rêves et leur volonté commune de s’enfoncer davantage, et de tester toutes les possibilités qui conduit au drame. Libéré de ce poids, Cobb a malgré tout peur du regard de ses enfants, une idée illustrée explicitement par le fait qu’ils ne tournent jamais vers lui dans ses souvenirs.

Cette deuxième problématique me pousse à penser que l’équipe de Cobb est bien constituée des gens qu’il connaît, et non de projections d’eux. Fischer fait certainement parti de la mission. En effet, l’idée qu’ils doivent implanter dans son esprit est, superficiellement, que son père veut le voir s’accomplir en tant qu’individu, et donc qu’il doit dissoudre l’entreprise familiale. Mais c’est surtout l’idée de la réconciliation parent/enfants qui prime. La culpabilité que ressent Cobb l’empêche d’affronter le regard de ses enfants, qu’il a privés de leur mère (c’est du moins certainement la façon dont il le ressent). A travers l’histoire de Fischer, c’est l’idée que ses enfants ne lui en veulent pas et n’attendent que la réconciliation avec lui, et donc son retour qui est implantée.


Saïto est là pour agir comme dilemme : soit le personnage se libère de ses craintes et de ses regrets, et il est en mesure non seulement d’avancer, mais d’aider les autres, soit il reste enfermé dans les limbes, entrainant les autres dans son drame (le train symbolisait très efficacementcette idée de danger permanent non seulement pour lui, mais aussi pour les autres. D'ailleurs le motif du train est intéressant, car le personnage ne "prend pas" le train à ce moment-là). Il est important que ce soit Saïto qui soit enfermé dans les limbes, puisque c’est lui qui a la possibilité de régler l’aspect légal de la situation. Ainsi, choisir de le sauver revient une nouvelle fois pour Cobb à se sauver lui-même de sa situation, tant techniquement qu’humainement.

Je continue de trouver passionnant d’élaborer des théories autour de l’intrigue, néanmoins, celle-ci me paraît la plus intéressante humainement, la plus poignante aussi.

lundi 26 juillet 2010

Les bourreaux

Aujourd'hui, une petite nouvelle qui n'est ni une fan fiction, ni en lien direct avec ce blog, si ce n'est que comme les articles publiés ici, elle est de moi. Il y a quand même un clin d'oeil que les lecteurs de spiderman 2099 devraient repérer.

***

Noir. Tout était noir. La lune ? Cachée. Les étoiles ? Invisibles. Les nuages avaient envahi le paysage, et rarement nuit avait paru plus sombre. Au milieu des ténèbres, la grande maison de Gabriel, brillant de mille feux, donnait l’impression d’être un phare. Elle se trouvait à l’extrémité d’une impasse longue de 300 mètres. Les maisons avoisinantes étaient avant tout des résidences secondaires et aucune d’elles ne laissait filtrer le moindre jet de lumière.
Gabriel s’était installé dans un bureau à l’étage, dont la grande fenêtre donnait sur le jardin. Il était la seule manifestation de vie qu’on pouvait distinguer dans les environs.
Finalement, il éteignit la lumière et quitta la pièce. Quelques instants après son départ, une silhouette jusqu’alors figée sur le balcon s’engouffra par la fenêtre, s’éclairant d’une lampe torche.
Sans perdre de temps, l’homme entreprit de fouiller le bureau. Il ouvrit les tiroirs et les fouilla en essayant de faire le moins de bruit possible. Sa recherche n’étant pas fructueuse, il sentit l’angoisse et l’énervement l’envahir. Ses gestes devinrent plus brutaux, et rapidement, il fut surpris par le son d’une poignée de porte que l’on tourne. En éclair, la lumière fut allumée, et il se retrouva nez à nez avec le propriétaire des lieux. Même s’il n’était plus dans sa prime jeunesse, ce dernier se jeta sur l’intrus et lui assena un direct en plein visage sans le lâcher. Les deux hommes luttèrent ainsi agrippés pendant quelques instants. Finalement, l’intrus se redressa et plongea sur Gabriel, qui bascula en arrière.
Un craquement horrible précéda un silence de mort. L’homme s’assit et tenta de reprendre son souffle. Il fut alors traversé d’un frisson. Il ne voyait plus Gabriel bouger. Sans trop y croire, il s’approcha. Mais il devait se rendre à l’évidence : il venait de tuer un homme. Ce n’était pas ce qu’il avait voulu… il n’avait fait que se défendre après tout… mais la situation ne plaidait pas en sa faveur. Il venait de pénétrer illégalement dans une résidence privée et avait été attaquée par légitime défense. La panique l’oppressait à présent au point qu’il avait du mal à respirer… si on le trouvait, il serait accusé d’homicide volontaire. Il n’avait plus le temps de réfléchir. Il fallait qu’il s’enfuie.
Il emprunta le même trajet que pour rentrer et arriva rapidement dans le jardin. Il lui fallait à présent traverser la longue impasse. Il avait le souffle court, mais il ne pouvait pas s’arrêter de courir. Lorsqu’il arriva au bout de l’impasse, ses poumons étaient en feu. Mais il avait des préoccupations plus immédiates que la douleur physique : contrairement à ce qui était prévu, la voiture de son complice n’était pas là. Avait-il été trahi ? Il attrapa son téléphone et composa un numéro. « C’est Miguel. T’es où ? »
***

Miguel était assis attablé dans une brasserie. L’endroit était inondé de monde, ce qui créait un bruit de foule des plus désagréables. L’établissement était en plein centre ville, et les salariés travaillant dans le quartier venaient y manger tous les jours de la semaine. C’était la première fois que Miguel venait, et même s’il était certain que c’était aussi la dernière, il devait reconnaître que c’était la planque idéale. Il pouvait observer à loisir sans que personne ne lui prête attention. Brun, légèrement basané, les yeux noisette et de taille moyenne, il avait un physique trop banal pour qu’on le distingue des autres clients. Il fallait néanmoins qu’il se montre discret. S’il regardait quelqu’un de façon trop insistante, il se ferait repérer. Il contemplait un couple assis trois tables plus loin. L’homme était âgé d’une cinquantaine d’années. D’allure athlétique, il portait un costume qui lui donnait un air important. Ses cheveux grisonnaient élégamment, et son visage présentait quelques fines rides. Il était accompagné d’une femme bien plus jeune que lui, arrangée comme un mannequin. Elle semblait fascinée.
Miguel sortir une photo de la poche de sa veste. C’était bel et bien sa cible. Le fameux Gabriel. La femme avec qui il déjeunait à ce moment là n’était par contre pas celle qui tenait son bras et celui d’un de leurs deux enfants sur la photo. Bien sûr, il pouvait s’agir d’un simple déjeuner d’affaires. Mais d’après ce qu’il savait de l’homme, il était plus que probable qu’il s’agissait d’une relation extraconjugale. Ça confirmait les informations qu’on lui avait transmises, mais peu importait, ce n’était pas l’objet de sa présence.
Il en avait vu assez. Il paya et quitta la brasserie.

***

« - C’est Miguel. T’es où ?
- J’ai dû m’éloigner un peu. Il y avait du passage et j’ai eu peur qu’on me remarque. Du coup je suis allé me garer un peu plus loin.
- C'est-à-dire ? Demanda Miguel, anxieux.
- T’inquiète pas pour ça, je serai vite ici. Tu as récupéré les papiers ?
- Non, je…
- Comment ça, non ? S’exclama le complice, hors de lui. Tu sais bien qu’on en a absolument besoin !
- Oui, je sais ! Mais les choses ne se sont pas déroulées comme prévues.
- Qu’est-ce que tu veux dire ?
- Il est mort. Déclara Miguel. Maintenant, rapplique, on doit partir avant que quelqu’un n’arrive !
- Non non non ! Il nous faut ces papiers, il n’y a pas d’autre solution ! Il faut que tu y retournes. Sans ça, tout est foutu ! On aura fait tout ça pour rien ! Je sais que tu te sens coupable, mais il faut y retourner !
-…. Ok. Répondit Miguel après quelques instants d’hésitation. Mais sois prêt à me récupérer cette fois.
- Je serai là. Fonce maintenant ! »

Miguel rangea son téléphone portable et rebroussa chemin. La longue impasse qui se présentait à nouveau à lui paraissait bien plus impressionnante que la première fois qu’il l’avait traversée. Les ombres qui la bordaient auraient pu dissimuler une multitude de dangers. Mais il n’avait pas le choix. Il ne pouvait plus reculer. Peut-être aurait-il dû refuser dès le début de s’impliquer dans cette histoire. Après tout, elle n’avait aucun rapport avec lui. Comment s’était-il laissé convaincre ?

***

Miguel se tenait aux côtés d’un homme à l’allure négligée qui semblait en état de choc. Ce dernier ne s’était pas rasé depuis quelques jours. Ses cheveux étaient sales et ses vêtements étaient froissés. Il serrait une tasse de café dans ses mains et fixait un point dans le vide, sans même s’en rendre compte. Miguel observait l’appartement dans lequel ils se trouvaient, sans réellement savoir quoi dire. Il s’agissait d’un studio pour une personne. Il n’était manifestement plus entretenu depuis quelques temps déjà. Les murs étaient jaunis par le temps, des vêtements trainaient par terre et des sacs poubelles remplis jonchaient le sol.
Miguel se sentait gêné comme jamais il ne l’avait été. Mais il était hors de question qu’il s’en aille. Les circonstances ne lui laissaient pas le choix.
Le silence pesant ne faisait qu’accroître son malaise, mais il avait beau chercher, il ne savait pas quoi dire. Finalement, l’homme se tourna cers lui et commença à parler :

« - Je vous remercie pour tout ce que vous avez fait, mais vous auriez dû me laisser finir. C’était la meilleure solution.
- Je… je sais que ça ne me regarde pas, mais pourquoi ? Demanda Miguel.
- Je comprends que vous vous posiez des questions. Je vous dois bien quelques réponses après tout. Je peux déjà vous dire mon nom. Je m’appelle Raymond.
- euh… moi c’est Miguel.
- Pas la peine que je vous dise autre chose que mon nom. Je n’ai plus de vie.
- Qu’est-ce que vous voulez dire ? Je ne comprends pas.
- Pourtant c’est simple. On m’a pris ma vie. Je n’ai plus rien.
- Une faillite ?
- Non, plus grave. Une faillite, c’est le hasard. Moi j’ai été piégé. Ce qui m’arrive n’a rien d’un hasard, c’est le résultat du travail d’un homme. Ce pourri savait ce qu’il faisait, et maintenant regardez dans quel état je suis !
- Mais si vous êtes victime d’une injustice, reprit Miguel, il y a des lois, il y a des moyens de réparer ça !
- Vous ne comprenez pas. Il a des relations. Même si j’avais les preuves, je ne pourrais rien faire.
- Personne n’est intouchable.
- Vous êtes naïf. Ce Gabriel m’a volé ma vie, et maintenant, c’est trop tard. »
Raymond posa sa tête dans ses mains et éclata en sanglots.

***

Il était 21 heures. Il faisait nuit. Et Miguel aurait déjà dû être chez lui. Mais il aimait visiter seul les logements qu’il devait vendre avant de les montrer à des acheteurs potentiels. Aujourd’hui, plus que jamais, alors que les ventes se faisaient si rares, il voulait mettre toutes les chances de son côté. L’appartement dans lequel il se trouvait possédait quelques atouts qu’il espérait bien mettre en valeur. Il s’agissait d’un T2 de 60 m² situé au 3ème étage d’un immeuble qui en comptait 8. La chambre était spacieuse, et la pièce principale paraissait vraiment agréable. Une fois l’examen des lieux fait, Miguel s’installe dans un fauteuil. Il retardait souvent le moment de rentrer chez lui. Ce n’était pas la solitude qui l’effrayait. C’était sa solitude. Et il ne pouvait plus la nier dans son petit appartement. Il ne s’épanouissait pas dans son travail, mais au moins, il ne pensait plus à tous ses projets avortés, ses espoirs laissés de côté, sa singularité oubliée. Non, son travail n’était pas un exutoire mais bien un assommoir. Et pour le moment, il n’avait pas trouvé d’autre moyen pour éviter de faire le point sur sa vie. Il se rendit compte qu’il était en train de faire ce qu’il détestait. Il se leva et commença à remettre de l’ordre. Alors qu’il se préparait à partir, il entendit un bruit qui le terrifia en provenance de l’appartement qui se trouvait juste au dessus.
C’était comme si ce fracas l’avait ramené plusieurs années en arrière. Il n’était encore qu’un enfant. Il jouait tranquillement devant la télévision. Un bruit sourd retentit, mais il n’y prêta pas attention. C’était l’heure du dessin animé qu’il détestait, celui pendant lequel sa mère le faisait goûter de manière à ce qu’il ne s’énerve pas en le regardant. Pourtant, il n’était pas en train de manger des gâteaux fourrés au chocolat en buvant un verre de lait. Sa mère n’oubliait jamais le rituel. Il commença à s’inquiéter et l’appela. Mais il avait beau crier, elle ne répondait pas. Il alla dans la cuisine. La première chose qu’il aperçut, c’était une paire de pieds qui pendait dans le vide. Il resta interdit quelques instants, ne comprenant pas bien ce qu’il se passait, puis hurla à s’en casser la voix.
Le bruit qu’il venait d’entendre lui rappelait celui qu’il avait entendu ce jour-là. Et s’il s’était passé quelque chose ? Il ne pouvait pas rester là sans rien faire. Il sortit de l’appartement en courant et grimpa les marches quatre par quatre.
Il tambourina contre la porte, mais voyant qu’on ne lui répondait pas, il l’enfonça d’un coup de pied. Une fois encore, la première chose qu’il vit c’est le bas d’un corps qui se secouait dans le vide. Sans réfléchir, il attrapa une chaise et y posa les pieds de l’homme. Puis, il grimpa à son tour sur un tabouret et décrocha la corde, avant d’installer la personne sur un fauteuil.
Une fois qu’ils eurent repris leur souffle, Miguel proposa de faire un café. Il posa une tasse chaude dans les mains de l’homme, et avala le sien d’une traite. A présent, qu’allait-il pouvoir dire ?

***

Miguel venait de rejoindre la maison de Gabriel. Il lui fallait à nouveau s’introduire dans le bureau. Il grimpa une fois de plus jusqu’au balcon et rentra par la fenêtre. Il tenta de ne regarder que le bureau, mais les pieds de sa victime dépassaient sur le côté. Il ne tarda pas à trouver l’enveloppe que lui avait décrite Raymond. Alors qu’il allait partir, son regard croisa celui inanimé de Gabriel. Ses yeux livides lui renvoyèrent l’image du corps de sa mère pendu qui se balançait devant lui. Il sursauta en voyant Gabriel tressaillir. Il n’était pas mort. Que devait-il faire ? Il ne pouvait pas laisser mourir quelqu’un, mais pouvait-il s’en tenir à ses principes quand la personne risquait de le dénoncer aux autorités ?
Il ne voulait pas le tuer, mais il ne voulait pas non plus finir en prison. Finalement, il prit un téléphone sans fil qui se trouvait sur le bureau et le déposa dans la main de son ennemi. « Tu es le seul à pouvoir te sauver ». Il se dirigea ensuite vers la fenêtre et ne put s’empêcher de jeter un dernier regard à l’homme qu’il avait laissé gésir à terre. En voyant son visage tordu par la douleur, il eut l’étrange impression qu’il lui était familier. Mais ça n’avait aucun sens. Il prit une profonde inspiration et s’éloigna de la maison. Puis il s’enfonça dans les ténèbres de l’impasse.

***

Avant l’enterrement de sa mère, le père de Miguel l’avait emmené au funérarium.

« - Tu vas pouvoir dire au revoir à maman.
- Non ! Je ne veux pas lui dire ! S’écria l’enfant.
- Moi non plus. Mais c’est la dernière fois qu’on va la voir.
- Non, je ne veux pas !
- Calme-toi ! Tout le monde nous regarde. Tu ne veux pas venir ? D’accord, reste là. Mais ne te fais pas remarquer ! »

Sans rien ajouter, son père ouvrit la porte et s’enfonça dans la pièce. Pris de paniquer, Miguel se glissa derrière lui avant qu’il ne referme. Il se trouvait à présent dans ce qui ressemblait à une grande chambre. Les murs rouge sombre et l’éclairage faible ne faisaient qu’accroître son sentiment d’oppression. Il y avait un grand lit à baldaquins au centre de la pièce. Sa mère y était allongée, comme si elle dormait. Son père se tenait déjà au dessus d’elle, mais il lui fallut plus de temps pour oser s’approcher. Il avait peur que sa mère ne se mette soudainement à bouger. Après quelques minutes, il fit quelques pas en direction du lit. Il distingua enfin ce visage qu’il connaissait si bien. Pourtant, il eut du mal à la reconnaître. Ses yeux étaient embués de larmes, mais il était certain que ce n’était pas sa mère. Ce n’était pas ses traits. Cette pensée le paralysa à tel point qu’il eut du mal à respirer. Il avait l’impression de ne plus réussir à reprendre son souffle.
Une sensation qu’il retrouva en courant dans l’impasse ténébreuse. Alors qu’il pensait s’arrêter quelques secondes pour reprendre sa respiration, le bruit des sirènes qui s’approchaient l’obligea à renoncer à cette pause. Des voitures de police se dirigeaient à présent dans sa direction. Il n’avait plus le choix, il devait faire demi-tour. Peut-être parviendrait-il à trouver une issue vers un jardin voisin. Il fallait qu’il trouve une sortie ! Il fallait qu’il sorte de la chambre funèbre ! Mais ses larmes l’empêchaient de distinguer la poignée de la porte. Alors qu’il s’agitait, sans parvenir à un résultat, une main ferme saisit son poignet.
On l’avait plaqué au sol, et à présent on le menottait. Il n’avait même plus la force de se débattre et se laissa faire. On le fit monter en voiture. La sonnerie d’un téléphone le ramena au jour des résultats de son bac. Il se tenait devant le panneau des résultats lorsque son téléphone sonna. En voyant qu’il s’agissait du numéro de son père, il prit quelques instants de réflexion. Finalement, il décida de ne pas décrocher.

***

Après l’enterrement de sa mère, Miguel avait senti son père s’isoler progressivement. La complicité qui les unissait avait céder la place à des échanges sans chaleur. C’était comme si son père évitait sa compagnie. Un jour, alors qu’il passait devant la chambre de ses parents, il entendit ce qui ressemblait à un sanglot. Il poussa doucement la porte, et découvrit son père qui pleurait, assis sur le lit. C’était la première fois qu’il voyait celui qui l’avait élevé manifester ainsi sa peine. Même au cimetière, il ne s’était pas épanché ainsi.
Miguel avait l’impression d’être un voyeur. Un frisson de dégoût le parcourut, et il s’éloigna en silence. Il commençait à s’habituer à la solitude, et il devrait la supporter jusqu’à aujourd’hui.

***

Les policiers avaient installé Miguel dans un bureau. Il n’arrivait pas à se concentrer sur ce qui lui arrivait. Les souvenirs se bousculaient dans sa tête, sans qu’il comprenne vraiment pourquoi. Il repensa à la dernière fois qu’il avait vu le visage de Gabriel. Il lui avait paru tellement familier. En fait, le visage tordu par la douleur de sa victime lui rappelait celui de son père qui pleurait. La ressemblance lui parut alors tellement évidente qu’il en vint à se demander si Gabriel et son père… après tout, cela faisait des années qu’il n’avait plus eu la moindre nouvelle de son père. Il l’avait cru mort, mais peut-être qu’il avait refait sa vie… Et si Gabriel était vraiment son père ? Non, c’était impossible. Une rencontre pareille n’arrivait pas par hasard.
Il expliqua une fois encore toute l’histoire aux enquêteurs. Mais chaque fois qu’il évoquait Raymond et l’appartement dans lequel il l’avait rencontré, on lui répondait que personne n’habitait là-bas. Dans une pièce voisine, Raymond attendait, assis. Il était rasé, coiffé, et portait un costume élégant. Un agent de police l’interpela :

« - Venez monsieur, on va vous montrer l’homme qu’on a trouvé chez votre père. Lui ne vous verra pas, mais il faudra que vous fassiez bien attention, afin que nous soyons sûrs que c’est lui que vous avez vu.
- D’accord. On m’a dit qu’il avait dérobé des documents à mon père. Vous savez de quoi il s’agissait ?
- Oui, il avait sur lui le testament de votre père.
- Le testament de mon père ? Mais comment… pourquoi ?!
- On pense qu’il comptait le modifier.
- Mais comment a-t-il sur ? S’écria Raymond. Il a tué mon père pour un testament ? Mais comment l’a-t-il connu ?
- Je comprends votre colère. Quand vous l’aurez identifié, vous pourrez rentrer vous reposer. Venez avec moi. »

Raymond reconnut immédiatement comme l’assassin de son père. On vérifia qu’il allait bien, puis il rentra chez lui.
Les murs de son appartement étaient recouverts de photos. Certaines le montraient avec Gabriel. Sur d’autres, on voyait Gabriel et Miguel enfant/
Raymond sortit un document d’une de ses poches.

« Je lègue toute ma fortune à mon fils, Miguel Bal, dont je n’ai pas su m’occuper après la mort de ma première épouse. J’ai conservé des documents permettant de le retrouver, ainsi que les documents prouvant nos liens de parenté ».
Raymond s’empara d’un briquet et brula le testament.

***

Raymond sourit. Effectivement, ce plan pour piéger son demi-frère avait tout pour réussir. Il se débarrasserait de lui, profiterait de la confusion pour échanger son testament trafiqué avec celui de son père quand les policiers le lui montreraient, et hériterait de ce qu’il méritait sans attendre que le vieux se décide à mourir. Il passa la corde autour de son cou et lança un carton rempli au sol. Quelques instants plus tard, il entendit des bruits de pas dans les escaliers. Cet imbécile de Miguel allait venir le sauver, comme il l’avait prévu. Il n’avait pas le choix. Il fallait maintenant qu’il mette en scène son suicide, avant que son demi-frère n’arrive. Il poussa le tabouret et se secoua dans le vide. Alors que la corde lui serrait le coup, il entendit quelques coups à la porte. Cette fois, c’était le moment, Miguel allait rentrer le sauver, et il n’aurait plus qu’à le convaincre, comme il l’avait si bien imaginé ! Mais contrairement à ce que pensait Raymond, personne ne rentra. Miguel avait fait le choix de se détourner… Il voulait crier, mais la corde serrait trop fort son cou pour qu’il émette le moindre son. Rapidement, tout devint flou. Il lutta quelques instants, puis ferma les yeux. Tout était fini.


FIN

mercredi 21 juillet 2010

Inception

Qu’est-ce qu’un fanboy ? Est-ce cet insupportable gamin geek qui poursuivait inlassablement le super-héros comique Freakazoid dans le dessin animé éponyme ? Est-ce un super-héros, dont le pouvoir est de s’investir complètement dans sa passion au point d’en oublier le monde extérieur ? Différentes définitions pullulent sur le net, mais on y retrouve constamment la question de l’attachement affectif à un objet, une œuvre, un personnage ou un artiste, souvent qualifiée de maladive. Si ma passion pour le cinéma de Christopher Nolan est immense, elle ne m’empêche pas de m’intéresser à d’autres œuvres. Néanmoins, j’avoue être prêt à aller voir ses films les yeux fermés. C’est d’ailleurs ce que j’ai tenté de faire en allant voir « Inception » : éviter tout spoiler, me limiter à la description du réalisateur et aux bandes annonces, et m’éloigner scrupuleusement de toute source d’information, ou même de tout spot tv susceptible de m’en dévoiler davantage.

Avant de me lancer dans mon avis à proprement parler, il me paraît important de revenir sur l’un des fondements de mes écrits : pour moi, il n’y a pas une vérité, et surtout pas en art. Je ne crois pas en l’objectivité. Je la rejette même, car je ne suis pas intéressé par les avis froids, mais au contraire, c’est la passion qui m’anime, et j’estime important de permettre à cette passion de rendre mes avis vivants. Au-delà de mon attachement évident pour le travail du réalisateur, je vais tenter d’expliquer les raisons de mon enthousiasme incroyable pour le film, tout en ne révélant rien de l’intrigue qui ne soit déjà révélé par les bandes annonces.



Comme tous les films bénéficiant d’un hype important, « Inception » a fait l’objet d’attaque bien avant sa sortie. Certains ont prétendu que Nolan avait plagié des œuvres telles que « Dreamscape » (thriller de science fiction à consonances politiques datant des années 80 et mettant en scène un tout jeune Dennis Quaid capable de pénétrer dans les rêves des gens), ou encore l’anime japonais « Paprika » de Satoshi Kon. Bien sûr, ces films ont en commun d’aborder l’exploration des rêves. Tout comme « Le parrain » et « les affranchis » abordent la mafia. Tout comme « le Lagon bleu » et « Lost » parlent de naufragés tentant de survivre. Pourtant, au-delà du thème, rien ne rapproche ces différents films, qui n’ont absolument pas les mêmes ambitions.

Le sujet et l’agencement des séquences du récit d’ « Inception » sont d’une densité vertigineuse, ce qui en soit le différencie non seulement des films cités auparavant, mais aussi de blockbusters comme « Avatar » ou la plupart des films sortant cet été. Trop compliqué, prétentieux ? Absolument pas. Comme toujours, Nolan respecte son public et lui livre un intrigue finalement simple, mais à la construction aussi complexe que riche. Tout en fragmentant sa structure narrative et la construisant sur plusieurs niveaux, le réalisateur/scénariste ne perd jamais son récit de vue, si bien que malgré l’aspect labyrinthique propre à l’esprit ne nous égare jamais. Ce n’était pas évident, puisque le rythme hallucinant rend les 2h20 aussi épuisantes qu’absorbantes. A tel point que lorsque le générique de fin apparaît, on se prend à regarder sa montre, en regrettant que l’expérience n’ait pas été plus longue.

Tout en étant pris par les événements et la tension permanente, on est constamment émerveillé devant le spectacle qui s’offre à nous. Visuellement, « Inception » est une prouesse qui n’a pourtant que très peu recours aux effets spéciaux actuels et privilégient les trucages à l’ancienne, pour un résultat aussi saisissant que crédible. Plutôt que de nous inonder de séquences assommantes et totalement déconnectées de la réalité, Nolan prend le parti de construire un monde des rêves très proche du monde réel, condition indispensable pour que l’arnaque onirique fonctionne sans que le rêveur n’ait conscience qu’il rêve. Ainsi, à la manière du protagoniste, on en vient constamment à se demander si l’action se déroule dans l’esprit d’un personnage ou dans la réalité. Pourtant, on ne triche pas en ne mettant en scène que des gros plans qui empêcheraient de se repérer. Au contraire, Nolan prend soin de multiplier les plans larges, offrant une vision concrète des lieux, permettant de trouver ses marques, avant de tout faire basculer.


Cette manipulation du spectateur n’est bien sûr pas due qu’au travail du réalisateur. En effet, à la manière du héros du film, Nolan s’est entourée d’une équipe de spécialistes chevronnés, avec qui il a collaboré à plusieurs reprises avec succès, pour un résultat inoubliable. Le directeur de la photographie Wally Pfister, qui travaille avec Nolan depuis « Memento », livre un travail incroyable, encore plus impressionnant que ce qu’il avait laisser voir dans « The Dark Knight », tout en restant dans une architecture très urbaine cher au réalisateur, et en conservant les teintes récurrentes dans ses autres films. Lee Smith, fidèle monteur, découpe chaque scène avec un souci du détail qui offre une lisibilité exemplaire, tant des lieux que des réactions des personnages. Le montage des scènes d’action dépasse tout ce que Nolan a fait jusqu’à aujourd’hui, y compris « The Dark Knight », qui était pourtant ponctué d’affrontements mis en scènes de façon dynamique, et toujours claire, comme ce climax inoubliable dans la tour Prewitt. D’ailleurs, non seulement aucune séquence ne se ressemble, mais la plupart des morceaux de bravoure sont totalement inédits. Rien ne pouvait préparer à une telle maîtrise de la technique filmique, mais aussi de la coordination des cascades, qui dépasse de loin ce que les films de Hong Kong ont pu apporter au cinéma américain en termes d’utilisation de câbles par exemple.

Les acteurs sont tous brillants, y compris ceux qui n’apparaissent que quelques instants. On a toujours plaisir à retrouver Michael Caine. Tom Hardy, qui s’était déjà révélé très charismatique dans le film anglais « Bronson » prouve qu’il sera un acteur à suivre, tout à fait capable de succéder aux héros charismatiques d’autrefois. Daniel Craig a du souci à se faire. Joseph Gordon-Levitt, acteur versatile, est très à l’aise, tant dramatiquement que physiquement (de ce point de vue, il est même impressionnant). Ellen Page et son allure frêle apportent un vent de fraicheur tout en nuance. Au rayon des bonnes surprises, Dileep Rao, et surtout Ken Watanabe qu’on voit bien plus que prévu. Cillian Murphy livre une de ses meilleures prestations, tout en retenue et en émotion. Mais c’est bien le couple Cottillard/Di Caprio qui remporte la donne. La première, dans un rôle de femme fatale, s’impose avant tout grâce à son jeu corporel. Le second réitère une performance digne de celle de « Shutter Island » en renouant avec toutes les obsessions des personnages torturés du cinéma de Nolan.
Enfin n’oublions pas la bande originale de Hans Zimmer. On repère quelques tonalités qui rappellent « la ligne rouge » ou « the dark knight », mais le film possède sa propre identité musicale (et sonore en général) avec plusieurs morceaux qui resteront longtemps en tête. J’ai beaucoup apprécié la finesse de certains morceaux pour un compositeur comme Zimmer qui privilégie les gros sons (ce qui est aussi le cas ici malgré tout).


Au-delà de tous ces aspects, « Inception » est surtout le premier vrai film d’auteur de Christopher Nolan. L’artiste a souvent travaillé en étroite collaboration avec son frère Jonathan. « Memento » reste son film le plus proche d’un film d’auteur, puisque même s’il s’inspire d’une nouvelle de son frère, c’est pour écrire un scénario très différent. « Inception » reste malgré tout l’œuvre de sa plume, et de sa plume uniquement. L’occasion de juger de ses talents d’écrivain. Et pour ça rien de plus simple : la séquence finale, qui reste peut être la conclusion la plus réussie de tous ses films (alors que celles de « Memento » et « The Dark Knight » me paraissaient déjà magistrales), tout en étant presque intégralement muette, est d’une émotion incroyable, et ce sont les détails visuels qui mettent en relief tous les enjeux de cette fin.
Un film à voir plusieurs fois, non pas parce qu’il est incompréhensible, mais parce qu’il doit se vivre et se revivre, pour se l’approprier différemment, pour en avoir une autre lecture… pour se replonger dans un rêve qu’on aurait aimé ne pas voir se terminer, tout simplement…

vendredi 16 juillet 2010

spider-man : the gauntlet - grim hunt

Annoncé en juin 2009 par Mark Waid, « The Gauntlet » était présenté comme une saga de plusieurs arcs mettant en scène d’anciens ennemis de l’homme araignée remis au goût du jour. Il ne s’agissait pas d’un mega crossover à proprement parler, mais d’une succession d’événements devant mener à un changement important dans la vie du héros. Le retour de criminels connus n’était pas censé être le fruit d’une machination, mais quelqu’un devait en tirer les fruits.

C’est l’épisode Amazing-spiderman 614 qui ouvrait la danse d’une histoire prenant fin il y a quelques jours dans les pages d’Amazing-spiderman 637, avec le dernier épisode de l’arc « the grim hunt ». Globalement, l’ensemble est non seulement inégal, mais on ne sent jamais l’unité, le crescendo, censé donner toute sa force à « the grim hunt ». Les événements sont tellement détachés les uns des autres, et finalement, sans grande importance, qu’hormis quelques scènes qui préparent l’attaque, on a bien du mal à voir l’idée germer.


Le prélude, très intéressant, mélange la farce et la tragédie. L’ambiance y est à la fois légère et sombre. Sasha Kravinoff, épouse de feu Kraven le chasseur, met en place les bases de son plan, dont on ignore les rouages, mais qui consiste, dans un premier temps, à faire dévier le héros de son destin. Ainsi, Deadpool est embauché pour détourner le héros de son chemin, qui consistait à sauver la mystérieuse madame Web et la jeune Mattie Franklin, qui eut droit à sa propre série, en tant que troisième spider-woman. Captivité de plusieurs mois, tortures, voilà le traitement réservé aux deux femmes, dans l’attente de la mise en application du plan.

Vient alors un premier arc mettant en scène un electro qui n’est plus le nul qu’il était. Une idée qui me rappelle vaguement quelque chose… marvel Knight : spider-man vous dîtes ? Mark Millar a déjà organisé ce type de retour ? Comment ça, la réexploitation d’anciens ennemis remis au goût du jour est l’essence de Marvel Knight : spider-man ? « Tha gauntlet » ne serait donc pas un projet original ? Et aussi surprenant que soit ce constat, il sera largement confirmé, non seulement par cet arc voyant Electro bénéficier du soutien de la population en jouant les portes paroles du peuple, mais par la majorité des histoires qui vont suivre. Elément important : le daily bugle est détruit, et Electro, après avoir été arrêté, est recruté par Sasha Kravinoff et le caméléon.

Recherche d’une enfant kidnappée mettant en scène l’homme sable, échantillon de sang de Peter Parker à voler à mister negative avec l’aide de la chatte noire, voilà quelques histoires sans grand intérêt, et dont la lecture n’a rien de mémorable. Mysterio interviendra également lors d’une guerre de gang qui verra spider-man tuer un homme de main. Bien sûr, il s’agit d’une mise en scène destinée à affaiblir le héros psychologiquement. Mysterio sera également recruté par les kravinoff.

Un nouveau vautour cannibale, Captain Universe qui essaie de tuer le fléau, sont également des histoires à l’intérêt discutable, dont le seul apport est de faire renvoyer Peter Parker du Bugle et de le discréditer professionnellement. On a par contre droit à une très belle histoire (dont les épisodes sont disséminés) sur Aleksei Sytsovich, plus connu sous le nom de « Rhino ». Pour une fois, le personnage n’est pas traité comme un imbécile sanguinaire. Au contraire, on nous montre un homme rangé, très humain, guéri par l’amour. Mais la menace d’un nouveau Rhino décidé à l’abattre pour obtenir le titre légitimement menace sa nouvelle vie. L’issue, inévitable, est viscérale et très marquante. L’écriture est cette fois de qualité, et le drame restera sur la conscience d’un spider-man qui ne sait plus où il en est.


Finalement, c’est le lézard qui finira de préparer le terrain avant la grande chasse dans un arc d’une laideur repoussante. Les dessins de Chris Bachalo (qui semble croire qu’il est mangaka) ne donnent absolument pas envie de tourner les pages, et ne collent pas du tout à l’ambiance d’un récit poisseux. L’histoire en elle-même possède quelques atouts mais ne parvient pas à être passionnante, à cause d’une narration fragmentée loin d’être maitrisée. Quelques points positifs cependant : Kaine, le clone violent de Peter pourchassé par les kravinoff, et la perte définitive du lézard, qui franchit allègrement les limites de l’horreur.

La construction menant à la grande chasse a bien du mal à convaincre. Malgré quelques bonnes idées et quelques épisodes convaincants, il n’y a pas grand-chose à retirer de ces 21 épisodes bien trop décousus pour permettre une montée en tension efficace. On est loin de la menace permanente de Knightfall où Bane préparait patiemment son attaque, harcelant Batman physiquement mentalement, et le poussant dans ses derniers retranchements avant de l’affronter. Plus récemment, « Batman Rip », constituait la conclusion à l’inventivité et à la dramaturgie exceptionnelle du premier chapitre d’une saga inoubliable. Face à ces deux références, « The gauntlet » fait réellement pale figure.

Alors que je n’y croyais plus trop (ça fait un moment que je ne crois plus trop en spider-man, j’ai bien du mal à me sentir impliqué depuis son pacte ridicule avec Méphisto, mais mon attachement au personnage me pousse à continuer la lecture), « Grim Hunt » débute. Et soudain, les espoirs les plus fous renaissent. Michael Lark, qui a dépeint avec brio les ruelles sombres de Hell’s Kitchen pour le run de Ed Brubaker sur Daredevil, nous livre un spider-man adulte, crédible et attachant. Les chasseurs sont inquiétants, puissants, et dessinés avec un réalisme aussi troublant que perturbant. La seule qualité du dessin suffit à faire de « Grim Hunt » une des meilleures histoires de l’homme araignée des dernières années. Loin des délires types mangas et des dessins cartoonesques qui empêchent de prendre les histoires au sérieux, le personnage prend bien plus d’ampleur. Mais si la partie graphique est brillante, Joe Kelly parvient en 4 épisodes à nous rappeler pourquoi Kraven le chasseur était si terrifiant. La description de cette famille digne de celle de leatherface devient plus crédible, et la menace qu’ils représentent, chacun à leur niveau fait craindre le pire. L’arc est extrêmement violent, et les meurtres sont très graphiques. L’ensemble est même malsain, tant le scénariste et le dessinateur ne sont pas avares en détails. Le suspense et la tension, omniprésents, suivent le crescendo qu’on attendait désespérément jusque-là.


Quelques facilités scénaristiques sont regrettables (Peter qui souffre d’une grippe, le coup classique, qui vient certainement compenser le fait que son affaiblissement moral et physique n’est pas franchement évident), mais l’histoire reste imprévisible, chose qu’on n’avait plus vue depuis longtemps dans les pages d’Amazing spider-man. Bien sûr, certains retournements de situation sont évidents, mais globalement, on reste surpris, et surtout épuisé par le rythme démentiel de cette histoire en 4 épisodes. Kelly ne se perd jamais en discours inutiles et va à l’essentiel, tapant dur, rendant son récit viscéral, s’assurant ainsi que le lecteur a peur pour les héros et attend désespérément la catharsis. Enfin, le retour de Kaine devient utile, et enfin, on voit Peter se comporter en homme. Cet arc nous rappelle également que les meilleures aventures de l’homme araignée ne sont pas celles écrites pour les enfants, où tout est rose et où on sourit constamment, mais bien les plus sombres et les plus dramatiques. Spider-man a beau être un héros plus léger qu’un Daredevil, il connaît lui aussi la tragédie au quotidien, et c’est lorsqu’elle frappe qu’il se montre le plus convaincant et le plus attachant.(Bien sûr, certaines histoires sérieuses sont ridicules et figurent parmi les pires aventures du héros « the other » tout le monde ?).

« Grim Hunt » est une expérience éprouvante, qui se vit plus qu’elle ne se raconte, et qui risque de faire parler d’elle encore longtemps. A découvrir absolument !

lundi 12 juillet 2010

Tintin contre les nains aphrodisiaques - volume 1 final

Précédemment dans « Tintin contre les nains aphrodisiaques » : Après le kidnapping du professeur Tournesol par des nains aphrodisiaques, Tintin est confronté à un ultimatum : soit il risque sa vie pour sauver le scientifique, soit il ne reverra jamais Milou. Avec l’aide de ses amis le capitaine Haddock et le général Alcazar, le reporter mène sa mission à bien. Les frères Dupons, qui ne sont pas ce qu’ils semblent être, vont enfin révéler leur secret…


« - Votre ordre ? Interrompit Tintin. Mais de quoi parlez-vous ? Vous n’êtes tout de même pas une secte ?!
- Mais enfin, pas du tout ! S’offusqua Dupont.
- Peu m’importe vos histoires ! S’écria le jeune homme. Je ne supporterai plus vos exigences avant que vous n’ayez libéré Milou ! J’ai fait ce que vous m’aviez demandé, à présent, il est temps que vous respectiez votre part du marché. Au nom de l’amitié, je vous en prie !
- Amenez le chien. Commanda Dupond à d’autres moustachus. A présent, je vais tout vous expliquer. Tout a commencé avec un jeune homme. Rien ne le distinguait du reste des citoyens de Belgique. Il n’avait pas de problèmes familiaux, pas d’ennemis. Sa vie était des plus banales. Un jour, il constata que son père n’était plus là. Pensant qu’il s’était absenté pour un voyage, le jeune homme ne se posa aucune question.
Après quelques jours, il finit par s’inquiéter de cette disparition. Sa mère restant silencieuse, il s’engouffra dans la chambre parentale, en quête de réponses. Il n’y avait aucune trace de son père. Pour être plus précis, c’était comme si son père n’avait jamais existé.
- Messieurs, coupa Tintin, j’ignore où vous voulez en venir, mais je n’ai pas le temps d’écouter vos élucubrations.

- Il le faut pourtant. Reprit Dupont. Je vais continuer si tu n’y vois pas d’inconvénient, Dupond. Le garçon fouilla toute la maison à la recherche d’indices. Mais c’était comme si on avait consciencieusement effacé toute preuve du passage de son père dans cette maison. Angoissé, il décida qu’il était temps de changer de stratégie. Il devait en savoir plus, quoi qu’il en coûte.
Il versa l’intégralité d’un flacon de solution nasale dans le bol de céréales de sa mère. Devant l’inefficacité du procédé, il se glissa derrière elle et l’assomma d’un coup à l’arrière du crâne.
Il l’attacha sur une chaise dans la cave et pointa une lampe halogène sur son visage. A pleine puissance. Il disposa des bouilloires sur la terroriste, partout où il le pouvait et la réveilla en lui hurlant dans l’oreille. Elle ne tarda pas à tout lui dire : son père avait une maîtresse depuis un certain temps. Elle l’avait même trouvé dans le lit conjugal en compagnie de la femme de ménage. Elle soupçonnait d’ailleurs qu’il s’était fait prendre à dessein, puisqu’il l’avait appelée pour qu’elle lui apporte une bière alors qu’il était en plein ébat. Face à une telle humiliation, elle l’avait vivement incité à sortir de leur vie.
Mais le jeune homme savait que son père était pur. S’il s’était conduit ainsi, c’était qu’on l’y avait forcé, il n’y avait pas d’autre explication. Et puis sa mère avait dû le mériter.
Quoi qu’il en soit, il retrouva la femme de ménage, et s’introduisit chez elle. Elle vivait dans un minuscule appartement, décoré en dépit du bon goût. Les murs étaient ornés de photographies où on la voyait en compagnie d’un enfant nain. Le jeune homme remarqua alors que la femme souriait de façon provocante à chaque fois qu’elle était en contact direct avec le nain.
Les jours suivants, il suivit le petit garçon qu’on voyait sur les photos, et consigna ses moindres faits et gestes dans un petit carnet rouge.
- Comme celui de Mao ? Persifla Tintin.
- J’ignore qui est ce Mao, répondit Dupond, mais je doute qu’il ait été la source d’inspiration du jeune homme. Si tu me le permets, Dupont, je vais continuer. Rapidement, il constate que l’enfant assistait à des réunions secrètes. Le but de ces rassemblements de nains était vague, mais il était clair qu’ils avaient le pouvoir de provoquer une spectaculaire montée d’hormones par un simple contact physique. Le jeune homme était persuadé que le but de ces nains aphrodisiaques, comme il les avait surnommés, était de détruire l’institution du mariage. Il ne pouvait pas les laisser faire. Il ne voulait pas que d’autres enfants connaissent le déchirement que provoquait la déliquescence de la structure familiale nucléaire. Mais comment lutter seul ?
Il ne possédait ni super pouvoirs, ni armes, ni fortune. C’est à ce moment-là qu’il comprit qu’il lui fallait abandonner son identité civile. Ce jour-là, il devint Dupon. Au fil des années, il trouva des soldats prêts à s’investir dans sa cause. Nous avons abandonné notre vie passée. Nous sommes devenus des Dupons. Partout en Belgique, il y a des Dupont et Dupond qui veillent dans l’ombre pour contrecarrer les plans des nains aphrodisiaques. Quant à vous Tintin, chaque événement important de vote vie, chaque épreuve, vous ont conduit ici, à ce moment.
- Que voulez-vous dire ? Interrogea le reporter. Vous n’insinuez tout de même pas que…
- Si, reprit Dupont. Vous devez devenir l’un d’entre nous. Il est temps pour vous d’accomplir votre destinée et de devenir un Dupon, et pas n’importe lequel.
- Vous n’y pensez pas enfin ! Qui va s’occuper de Moulinsart ? Et que va devenir Milou ?!
- Le capitaine Haddock s’occupera de votre château. Expliqua Dupond. Quant à Milou, il nous serait très utile.
- Je suis navré, mais je refuse ! S’écria Tintin. Mais… qu’est-ce que c’est que ce bruit ?
- Vous n’avez pas détruit leur machine ? Hurla Dupont ?!
- Vous ne m’avez jamais parlé de machine ! Répliqua Tintin.
- Alors il est trop tard. Ils ont réussi à synthétiser la substance dont se servait le professeur pour ses implants capillaires. Ils ont dû lâcher une bombe contenant leur gaz, de manière à provoquer une catastrophe aphrodisiaque sur le pays. C’est la fin. »


Un couronnement, un duel à mort, des révélations, de l’action, de la passion…. A suivre… dans le volume 2 de « Tintin contre les nains aphrodisiaques » !!!

jeudi 8 juillet 2010

Tintin contre les nains aphrodisiaques volume 1 épisode 3

Précédemment dans « Tintin contre les nains aphrodisiaques » :"grâce à un plan à l’audacieuse complexité, Tintin a pu soutirer au livreur de chaussures des nains l’adresse de leur quartier général. Conscients qu’ils auront du mal à y entrer, le capitaine Haddock et lui se rendent dans le laboratoire du professeur Tournesol afin de trouver une invention qui facilitera leur assaut."

Le soir venu, des hommes en treillis de camouflage déambulèrent dans les rues. Le capitaine Haddock les précédait. Il était assis sur la selle du cheval du Général Alcazar, dont il serrait la taille avec beaucoup de vigueur. La petite troupe faisait tant de bruit devant l’entrepôt que les nains ne tardèrent pas à sortir du bâtiment. Ils se postèrent sur les remparts qui entouraient l’entrepôt, prêts à le défendre au péril de leur vie.

« - Caramba ! S’exclama le général Alcazar. Ces nains sont complamenté fous !
- Sauvages ! Hurla le capitaine Haddock. Analphabètes ! Je vais vous apprendre, flibustiers ! Mais c’est qu’ils nous bombardent ces saltimbanques de pacotille ! Tintin, moussaillon, j’espère que vous savez ce que vous faîtes !
- Lé yeune homme arrivéra à coup sour ! Déclara Alcazar. »



A quelques rues de là, sur le toit d’un immeuble… Tintin, vêtu d’un blouson en cuir d’aviateur et portant une paire de lunettes de soleil de marque, chevauchait la moto qu’avait trouvée le capitaine dans le laboratoire.
Nos héros avaient disposé des rampes diagonales sur tous les toits du quartier. Bien sûr, ce dispositif n’aurait pas été suffisant sans un petit ajout de Tryphon… Tintin déclencha la nitro et s’élança à toute allure. Bondissant ainsi de toit en toit, il fut bien vite à proximité de l’entrepôt. Alertés par le bruit, les nains se détournèrent du marin et du général et se préparèrent à bombarder le reporter. Mais avant qu’ils n’aient eu le temps de s’attaquer à lui, le jeune survola les remparts. Une fois au sol, il accéléra une fois encore, manquant d’écraser les nains aphrodisiaques à tout moment. Ces derniers se métamorphosèrent alors en nains acrobatiques et sautèrent dans tous les sens afin d’esquiver les bolides qui fonçaient sur eux.





Profitant de la confusion, Tintin se dressa sur une roue et pénétra dans le bâtiment. Roulant sur les marches, il se précipita à l’étage avant de plonger de son véhicule. Il dégaina un sac de toile et y enferma les gardiens de son ami, qui était inconscient. Il entendit alors le reste de leurs ennemis qui se précipitait vers eux. Levant la selle de sa monture motorisée, il s’empara d’une sorte de raquette métallique qu’il jeta au sol. Il installa le professeur, s’assit, puis mit les gaz. Lorsqu’il roula sur la raquette, elle se redressa, projetant la moto dans les airs. Alors que leur saut entrait dans la phase descendante, et qu’ils allaient s’écraser contre les remparts sans atteindre l’extérieur, Tintin appuya sur un bouton caché…

« - Mille sabord ! Regardez général ! La moto a des ailes !
- Ma si ! S’écria Alcazar ! Ils planent ! Cé garçon a téllamenté dé réssources ! »

L’engin plana quelques instants avant de se poser dans un parc. Mais le jeune homme ne s’arrêta pas. Il s’assura que le professeur était toujours à ses côtés, puis s’élança une dernière fois, pour ne s’arrêter qu’une fois arrivé à la base des Dupons.
Il posa gracieusement le véhicule à l’entrée, puis fut accueilli par les deux jumeaux policiers.

« - Venez Tintin. Nos experts vont s’occuper du professeur. Pendant ce temps, nous allons vous expliquer ce dont il retourne. Déclara Dupond.
- Je dirais même plus, nous allons tout vous expliquer ! Ajouta Dupont.
- Attendez ! S’écria Tintin. Je veux voir le professeur. Il aura besoin d’une figure familière à son réveil.
- Ne vous inquiétez pas pour ça. Répondit Dupont. Il verra l’un d’entre nous. Mais maintenant que le danger immédiat est écarté, il faut que vous compreniez les enjeux de notre lutte. Vas-y Dupond.
- Merci Dupont. L’histoire que je vais vous raconter cher Tintin, constitue l’origine secrète de notre ordre sacré. Elle ne doit jamais quitter ces murs.
- Votre ordre ? Interrompit le jeune homme. Mais de quoi parlez-vous ? Vous n’êtes tout de même pas une secte ?



A suivre....

lundi 5 juillet 2010

Tintin contre les nains aphrodisiaques - volume 1 épisode 2

Précédemment dans "Tintin contre les nains aphrodisiaques" :"Le capitaine Haddock, le professeur Tournesol et Tintin ont été attaqués par d'étranges nains aux pouvoirs aphrodisiaques. Seule l'inetrvention héroïque des 2 frères Dupont et Dupond a permis qu'ils ne soient pas tous enlevés. Malheureusement, Tournesol n'a pas pu être sauvé...."

Rien ne laissait présager l’aspect intérieur de l’endroit. On avait installé un véritable quartier général, rempli d’ordinateurs et d’équipement high tech. Le mobilier sortait tout droit du rayon le plus design d’un magasin de décoration, et les murs étaient d’un blanc immaculé dont l’intensité forçait à plisser les paupières. Mais le plus étonnant restait la présence de plusieurs dizaines de Dupons. Pourtant, Tintin était persuadé de ne pas rêver.

« - A présent, je vais vous expliquer de quoi il retourne. Déclara Dupond.
- Je dirais même plus. Reprit Dupont. Je vais vous expliquer. Les nains aphrodisiaques ont enlevé le professeur Tournesol pour pervertir une de ses inventions.
- De quelle invention parlez-vous ? Demanda Tintin.
- Il s’agit d’un ingénieux implant capillaire censé décupler les capacités intellectuelles de celui qui le porte ! Expliqua Dupont. Vous devez retrouver Tournesol pour empêcher qu’il ne les aide !
- Et pourquoi on devrait vous aider ? Interrogea le capitaine Haddock. C’est vous les policiers ! Voyez avec votre hiérarchie nom d’une pipe !
- Cette histoire ne concerne pas la police. Répondit Dupond.
- Je dirais même plus ! Ajouta Dupont. Ça ne concerne pas la police ! Tintin, vous êtes obligé de nous aider. Milou ne vous sera rendu que lorsque le professeur sera en lieu sûr.
- Milou ?! Qu’est-ce que vous lui avez fait ? S’écria le jeune homme. Je vous préviens que si vous touchez à un de ses poils…
- Milou est confortablement installé. Déclara Dupont.
- Je dirais même plus, Milou est en lieu sûr. Reprit Dupond. Nous ne voulons de mal à personne. Mais nous devons êtres sûrs que vous nous aiderez. Vous aurez toutes les réponses que vous voudrez plus tard.
- Mais enfin ! S’exclama Tintin. C’est insensé ! Dupont, Dupond, nous sommes amis ! Pourquoi tant de mystères ?!
- Vous ne voyez pas qu’on ne peut pas faire confiance à ces marins d’eau douce, Tintin ! Grommela le capitaine.
- Je suis désolé, mais vous n’avez pas le choix. Annonça Dupont.
- Je dirais même plus, vous n’avez pas le choix. On ignore totalement où se trouve le quartier général des nains aphrodisiaques. On connaît par contre leur fournisseur en chaussures. C’est auprès de lui que vous devez commencer vos investigations. Bien sûr, ce n’est pas aussi simple que ça en a l’air. Le dépôt de monsieur Van Berg est une forteresse, et on ne vous laissera pas y entrer. Le seul moyen pour que vous le rencontriez serait de vous rendre dans son restaurant favori. Il y déjeune tous les jeudis. Bien sûr, l’endroit est entièrement réservé lorsqu’il y va. Vous ne pourrez pas y entrer en tant que clients. Tenez, voilà l’adresse.
- Venez capitaine, ne perdons pas de temps ! »



Le plan du duo reposait sur plusieurs phases dont le timing devait être précis. Le capitaine Haddock commença par acheter un joli panier en osier. Puis il s’invita dans le parc municipal afin d’y emprunter quelques roses, qu’il posa délicatement dans le panier. Tintin de son côté dégaina sa carte de presse en prétextant un reportage sur le système des égouts. Profitant d’un instant d’inattention de son guide, il s’éclipsa dans un couloir qui donnait sur les vestiaires. Un employé qui se douchait avait soigneusement plié son uniforme et l’avait déposé sur un banc. Le jeune homme s’en empara et, déguisé de la sorte, s’engouffra dans un tunnel, muni d’une carte du réseau. Cette traversée des souterrains était aussi répugnante qu’exaltante. Il se trouvait à présent sous le restaurant. Il consulta sa montre : si tout s’était bien passé, le capitaine Haddock devait être à l’entrée. Sa mission était de créer suffisamment d’animation en insistant pour vendre des fleurs, afin de détourner l’attention des hommes de main. Tintin s’équipa d’un pince-nez, puis s’enduit généreusement d’huile d’olive. Il prit une profonde inspiration, puis se jeta à l’eau. Il s’engouffra alors dans un tuyau très étroit, dans lequel il n’aurait jamais pu se glisser sans l’huile. Ondulant tel une anguille, il remonta l’ensemble de la canalisation. Après les secondes les plus longues de sa vie, il vit le bout du tunnel, et enfin, sortit sa tête d’une cuvette de toilettes.




Il se trouvait à présent dans les wcs pour hommes, isolé dans une cabine. Il consulta sa montre waterproof : il était arrivé juste à temps. C’était l’heure précise où le commis de cuisine venait se recoiffer. Conscient qu’il lui fallait l’immobiliser immédiatement, il ouvrit la porte et bondit sur le jeune homme qui s’admirait devant le miroir. Il l’attrapa par les cheveux et lui cogna la tête contre le lavabo, l’assommant. Il emprunta alors les vêtements de sa victime et l’attacha à la cuvette avant de le bâillonner. Ainsi déguisé, il n’avait plus qu’à se rendre en cuisine. Il versa une mixture maison dans le plat de Van Berg, qui ne manquerait pas de venir le féliciter. Et effectivement, il ne lui fallut attendre que quelques minutes avant que ce dernier ne fasse irruption dans la cuisine.
Il commença par flatter Tintin, puis, dégoûté par son odeur, ordonna à ses hommes de se débarrasser de lui.
Sans perdre un instant, le reporter se jeta sur le premier gorille qui se présenta et l’assomma d’un direct en plein visage. Il envoya le second au tapis en lui claquant littéralement la porte au nez. Il constata alors que les hommes de main de Van Berg étaient plus des ouistitis que des gorilles.

« - Laisse moi partir et je te donnerai 50 euros ! S’exclama le vendeur de chaussures.
- Je ne veux pas votre argent. Répondit Tintin. Je veux juste… 50 euros ?! C’est une plaisanterie ? Vous essayez de m’insulter ?! Sachez que je n’ai aucun problème financier monsieur ! Je veux juste retrouver mon ami !
- Mais qu’est-ce que j’ai à voir avec ça ?
- L’adresse où vous livrez les chaussures aux nains. Je la veux.
- Non, je ne peux pas ! Vous ne savez pas ce dont ils sont capables !
- Rassurez-vous. Reprit Tintin. Quand je les aurai trouvés, vous serez le cadet de leurs soucis.
- Je vous note leur adresse, mais vous ne parviendrez jamais à entrer, c’est une véritable forteresse !
- C’est ce que nous allons voir. »

Le jeune homme sortit par la grande porte, conscient que ce geste ne passerait pas inaperçu. Ses ennemis l’attendraient de pied ferme, mais la peur s’installerait. Une fois hors du restaurant, il aperçut le capitaine Haddock qui se disputait avec un fleuriste.

« - Vampire ! Anarchiste ! Bourreau des mœurs !
- Mais enfin capitaine, que se passe-t-il ?!
- Cet hurluberlu ne cesse de déplacer son chariot pour me voler mes clients, voilà ce qui se passe !
- La rue appartient à tous ! Répondit le marchand.
- Allons messieurs, tâchons de nous comporter en gentlemen. Intervint Tintin.
- Mille milliards de mille sabords ! S’exclama Haddock. Ne me dîtes pas que vous donnez raison à cet Olybrius Tintin !
- Il ne s’agit pas de ça capitaine. Nous avons ce pour quoi nous sommes venus.
- Vous l’avez ? Mais c’est formidable ! Mais je ne peux pas laisser ce malotru se conduire ainsi en toute impunité ! S’écria le capitaine. Mais… où est-il passé ?
- Peu importe. Nous n’avons plus de temps à perdre ! Venez !
- Escroc, imposteur… »

Si Van Berg avait dit la vérité, le professeur Tournesol était retenu dans un vieil entrepôt aux abords de la ville. Effectivement, un assaut frontal paraissait extrêmement dangereux. Ils n’avaient que peu de temps pour préparer leur stratégie. Ils retournèrent à Moulinsart, espérant trouver une invention de leur ami dont ils pourraient se servir afin de mener leur attaque. La pièce qu’avait investie le professeur était dans un tel désordre qu’ils ignoraient totalement où chercher.

« - Tintin, venez voir ! J’ai trouvé !
- Je suis désolé capitaine, mais je ne crois pas que ce soit le moment de faire de la motocyclette. Gronda Tintin.
- Mais non sacripant ! Regardez les plans dessinés par Tryphon ! C’est notre porte d’entrée ! »



A suivre

vendredi 2 juillet 2010

Tintin contre les nains aphrodisiaques - volume 1 épisode 1

Voici donc le début d'une nouvelle fan fiction mettant en scène le célèbre reporter belge. En guise d'introduction, je vous propose une vidéo faite maison qui n'a rien à voir avec le sujet. Je précise que j'adore les kangourous et qu'il me semble qu'il y a eu plus d'humains blessés que d'animaux:







Le capitaine Haddock sirotait une bière à la terrasse d’un bar. Il aimait s’isoler régulièrement, loin de Moulinsart, et renouer avec ses habitudes de marin. Sa vie avec Tintin était passionnante, mais il avait parfois l’impression de ne plus être lui-même. Alors qu’il était obnubilé par cette introspection de comptoir, son attention fut captée par le spectacle d’un groupe de nains habillés en mimes qui se trémoussaient comme des danseurs de salsa ayant abusé du chili con carné épicé. C’était une vision insolite, et il ne put s’empêcher de remarquer que tout le monde, lui compris, semblait sensible à ce qu’il se passait. Très sensible.
A quelques kilomètres de là, le professeur Tournesol travaillait à la création d’une prothèse capillaire censée décupler les capacités intellectuelles de son porteur. C’était un projet ambitieux qu’il entreprenait avec son confrère et ami, le professeur Dubloc, un homme chauve à la barbe rousse impressionnante. Tout à coup, la sonnerie de la porte d’entrée du laboratoire retentir :

« - Tiens, nous avons de la visite ! S’exclama Dubloc.
- Comment ça je ne suis pas invisible ? S’exclama Tournesol.
- Non, je voulais dire qu’on sonne à la porte !
- Bien sûr que c’est une teinture naturelle. Répondit Tournesol. Vous savez bien que je suis contre tous ces produits chimiques !
- Laissez tomber, je vais ouvrir la porte. Reprit Dubloc.
- Je ne vous le fais pas dire ! »

Lorsque le professeur Dubloc ouvrit la porte, il fut surpris de ne trouver personne face à lui. Puis il baissa les yeux et constata que c’était un nain au regard lubrique qui venait de sonner. De manière inexplicable, il sentit ses hormones le réchauffer de part en part.

Au même moment, Tintin couvrait une exposition au musée pour le quotidien « Moulinsart People ». Le thème était les hommes fleurs du Rhin. Ce sujet n’intéressait pas du tout le jeune homme, mais il devait refaire ses preuves en tant que journaliste avant qu’on ne lui confie des enquêtes plus sérieuses. Il avait décidé de reprendre son travail pour s’éloigner un peu de Moulinsart, où il avait l’impression de ne plus avancer. De plus, l’attitude paternaliste du capitaine Haddock le mettait de plus en plus mal à l’aise, et il avait besoin de réfléchir à leur relation.

Alors qu’il s’apprêtait à prendre en photo l’une des statues d’homme fleur, une petite forme roula devant lui en couinant. Il constata alors qu’il était entouré de nains déguisés en hommes fleurs. Or, il savait pertinemment que ce groupe refusait les personnes qu’il qualifiait de « différentes », raison pour laquelle il n’avait lui-même pas pu en faire partie. Tout à coup, le conservateur du musée trébucha sur l’un des nains. A peine l’avait-il touché qu’un désir irrépressible d’organiser une orgie l’envahit, ce que ne manqua pas de remarquer Tintin. Cette atmosphère de désir s’étendit à chaque personne qui rentrait en contact avec l’un des nains. Le reporter comprit alors qu’il était leur cible. Ils s’approchaient lentement mais sûrement de lui, et s’apprêtaient à le toucher à tout instant. Il ne pouvait pas se laisser faire. Tel Conan le destructeur, il devait s’emparer d’une épée à faire tournoyer. Faute de lame, il attrapa un lourd vase et tenta de balayer ses adversaires. Mais il perdit l’équilibre et s’étala de tout son long. Il avait raté sa chance et était à leur merci…. C’était la fin.
Il se roula en boule dans l’attente de l’attaque. Mais après une vingtaine de secondes, rien ne s’était passé. Il ouvrit les yeux et vit les Dupont et Dupond qui l’aidèrent à se relever.

« - Sapristi, je n’ai jamais été aussi content de vous voir !
- Nous n’avons pas le temps de parler. Lança Dupond. On doit y aller !
- Je dirais même plus. Ajouta Dupont. Nous devons partir ! »

Les nains reposaient tous au sol, inconscients. Sans perdre un instant, le trio sortir du musée et s’engouffra dans une berline noire. Le reporter était encore sous le choc. Il n’avait jamais été confronté à une telle attaque, et il n’avait pas l’habitude d’être secouru par Dupont et Dupond.
Ces derniers étaient d’ailleurs étonnamment silencieux. Tintin reconnut alors le quartier où ils se trouvaient : c’était là que le professeur Tournesol se rendait lorsqu’il souhaitait mener des expériences sans risquer les représailles du capitaine Haddock.

Il n’eut pas le loisir de s’interroger davantage sur la raison de cette destination, car les frères policiers l’invitèrent à descendre de voiture. Le trajet jusqu’au laboratoire se fit sans qu’une parole ne soit échangée. Lorsqu’ils furent à proximité de l’entrée, Tintin aperçut des jambes. Quelqu’un était allongé sur le pallier, et ce n’était certainement pas pour faire une sieste. Il s’approcha, anxieux. Tournesol était-il évanoui, ou était-ce plus grave ? Une fois devant l’encadrement de la porte, il constata avec soulagement qu’il ne s’agissait pas de son ami mais d’un homme chauve à la barbe rousse.

Peu intéressé par le sort de l’inconnu, le reporter pénétra dans le laboratoire et entreprit d’examiner la scène du crime. La victime tenait la manche d’une veste qui pendait au porte-manteaux d’entrée. Tintin vit la scène : on sonne à la porte. Le chauve hideux ouvre. Un nain aphrodisiaque se jette sur lui. L’homme bascule en arrière et tente de se rattraper à une veste, mais la manche qu’il agrippe se déchire et il est précipité au sol. Le plaisir provoqué par l’explosion hormonale n’a d’égale que la douleur de son crâne qui s’écrase contre le carrelage.

Tintin s’approcha alors d’un établi où reposaient des débris de tubes à essai. Tournesol n’a pas entendu l’affrontement entre son confrère et leur visiteur. Il reste concentré sur sa tâche et tente d’assembler deux composés extrêmement instables. Au moment où le nain bondit pour appliquer un mouchoir imbibé de chloroforme sur son visage, le professeur mélange les produits. Une petite explosion souffle alors les deux hommes qui mordent la poussière.
Tournesol avait donc été kidnappé… Mais pourquoi ?! Qui pouvait en vouloir à un homme si charmant ? A moins qu’une de ses conventions ne soit convoitée par quelque esprit maléfique. Oui, c’était certainement ça.

Des éclats de voix attirèrent l’attention du jeune homme. « Tonnerre de Brest ! Vous allez me dire ce qu’on fait là bande de moules à gaufres ! »
Le capitaine Haddock fit alors irruption, suivi de Dupont et Dupond. Mais cela n’avait aucun sens ! Les 2 frères policiers étaient déjà dans le laboratoire avec Tintin. A présent, ils étaient 4 !

« - Messieurs, je crois que vous nous devez quelques explications ! Déclara le reporter.
- Je suis désolé, nous ne pouvons rien dire pour l’instant. Répondit Dupond.
- Je dirais même plus. Reprit Dupont. Nous ne pouvons rien dire pour le moment !
- Mille milliards de sabords ! S’écria le capitaine. Iconoclastes ! Va nus pieds !
- Calmez-vous capitaine ! Intervint Tintin. Je suis certain que nos amis ont une explication.
- En effet, mais nous ne pouvons pas en parler maintenant. Répondit Dupont.
- Je dirais même plus, compléta Dupond, nous ne pouvons pas en discuter maintenant.
- Et vous croyez qu’on va vous suivre comme ça ? S’écria Haddock. Bande de bachibouzouks !
- Nous sommes désolés. Déclarèrent les Dupons. Mais vous devez nous suivre. »


A suivre....