vendredi 16 juillet 2010

spider-man : the gauntlet - grim hunt

Annoncé en juin 2009 par Mark Waid, « The Gauntlet » était présenté comme une saga de plusieurs arcs mettant en scène d’anciens ennemis de l’homme araignée remis au goût du jour. Il ne s’agissait pas d’un mega crossover à proprement parler, mais d’une succession d’événements devant mener à un changement important dans la vie du héros. Le retour de criminels connus n’était pas censé être le fruit d’une machination, mais quelqu’un devait en tirer les fruits.

C’est l’épisode Amazing-spiderman 614 qui ouvrait la danse d’une histoire prenant fin il y a quelques jours dans les pages d’Amazing-spiderman 637, avec le dernier épisode de l’arc « the grim hunt ». Globalement, l’ensemble est non seulement inégal, mais on ne sent jamais l’unité, le crescendo, censé donner toute sa force à « the grim hunt ». Les événements sont tellement détachés les uns des autres, et finalement, sans grande importance, qu’hormis quelques scènes qui préparent l’attaque, on a bien du mal à voir l’idée germer.


Le prélude, très intéressant, mélange la farce et la tragédie. L’ambiance y est à la fois légère et sombre. Sasha Kravinoff, épouse de feu Kraven le chasseur, met en place les bases de son plan, dont on ignore les rouages, mais qui consiste, dans un premier temps, à faire dévier le héros de son destin. Ainsi, Deadpool est embauché pour détourner le héros de son chemin, qui consistait à sauver la mystérieuse madame Web et la jeune Mattie Franklin, qui eut droit à sa propre série, en tant que troisième spider-woman. Captivité de plusieurs mois, tortures, voilà le traitement réservé aux deux femmes, dans l’attente de la mise en application du plan.

Vient alors un premier arc mettant en scène un electro qui n’est plus le nul qu’il était. Une idée qui me rappelle vaguement quelque chose… marvel Knight : spider-man vous dîtes ? Mark Millar a déjà organisé ce type de retour ? Comment ça, la réexploitation d’anciens ennemis remis au goût du jour est l’essence de Marvel Knight : spider-man ? « Tha gauntlet » ne serait donc pas un projet original ? Et aussi surprenant que soit ce constat, il sera largement confirmé, non seulement par cet arc voyant Electro bénéficier du soutien de la population en jouant les portes paroles du peuple, mais par la majorité des histoires qui vont suivre. Elément important : le daily bugle est détruit, et Electro, après avoir été arrêté, est recruté par Sasha Kravinoff et le caméléon.

Recherche d’une enfant kidnappée mettant en scène l’homme sable, échantillon de sang de Peter Parker à voler à mister negative avec l’aide de la chatte noire, voilà quelques histoires sans grand intérêt, et dont la lecture n’a rien de mémorable. Mysterio interviendra également lors d’une guerre de gang qui verra spider-man tuer un homme de main. Bien sûr, il s’agit d’une mise en scène destinée à affaiblir le héros psychologiquement. Mysterio sera également recruté par les kravinoff.

Un nouveau vautour cannibale, Captain Universe qui essaie de tuer le fléau, sont également des histoires à l’intérêt discutable, dont le seul apport est de faire renvoyer Peter Parker du Bugle et de le discréditer professionnellement. On a par contre droit à une très belle histoire (dont les épisodes sont disséminés) sur Aleksei Sytsovich, plus connu sous le nom de « Rhino ». Pour une fois, le personnage n’est pas traité comme un imbécile sanguinaire. Au contraire, on nous montre un homme rangé, très humain, guéri par l’amour. Mais la menace d’un nouveau Rhino décidé à l’abattre pour obtenir le titre légitimement menace sa nouvelle vie. L’issue, inévitable, est viscérale et très marquante. L’écriture est cette fois de qualité, et le drame restera sur la conscience d’un spider-man qui ne sait plus où il en est.


Finalement, c’est le lézard qui finira de préparer le terrain avant la grande chasse dans un arc d’une laideur repoussante. Les dessins de Chris Bachalo (qui semble croire qu’il est mangaka) ne donnent absolument pas envie de tourner les pages, et ne collent pas du tout à l’ambiance d’un récit poisseux. L’histoire en elle-même possède quelques atouts mais ne parvient pas à être passionnante, à cause d’une narration fragmentée loin d’être maitrisée. Quelques points positifs cependant : Kaine, le clone violent de Peter pourchassé par les kravinoff, et la perte définitive du lézard, qui franchit allègrement les limites de l’horreur.

La construction menant à la grande chasse a bien du mal à convaincre. Malgré quelques bonnes idées et quelques épisodes convaincants, il n’y a pas grand-chose à retirer de ces 21 épisodes bien trop décousus pour permettre une montée en tension efficace. On est loin de la menace permanente de Knightfall où Bane préparait patiemment son attaque, harcelant Batman physiquement mentalement, et le poussant dans ses derniers retranchements avant de l’affronter. Plus récemment, « Batman Rip », constituait la conclusion à l’inventivité et à la dramaturgie exceptionnelle du premier chapitre d’une saga inoubliable. Face à ces deux références, « The gauntlet » fait réellement pale figure.

Alors que je n’y croyais plus trop (ça fait un moment que je ne crois plus trop en spider-man, j’ai bien du mal à me sentir impliqué depuis son pacte ridicule avec Méphisto, mais mon attachement au personnage me pousse à continuer la lecture), « Grim Hunt » débute. Et soudain, les espoirs les plus fous renaissent. Michael Lark, qui a dépeint avec brio les ruelles sombres de Hell’s Kitchen pour le run de Ed Brubaker sur Daredevil, nous livre un spider-man adulte, crédible et attachant. Les chasseurs sont inquiétants, puissants, et dessinés avec un réalisme aussi troublant que perturbant. La seule qualité du dessin suffit à faire de « Grim Hunt » une des meilleures histoires de l’homme araignée des dernières années. Loin des délires types mangas et des dessins cartoonesques qui empêchent de prendre les histoires au sérieux, le personnage prend bien plus d’ampleur. Mais si la partie graphique est brillante, Joe Kelly parvient en 4 épisodes à nous rappeler pourquoi Kraven le chasseur était si terrifiant. La description de cette famille digne de celle de leatherface devient plus crédible, et la menace qu’ils représentent, chacun à leur niveau fait craindre le pire. L’arc est extrêmement violent, et les meurtres sont très graphiques. L’ensemble est même malsain, tant le scénariste et le dessinateur ne sont pas avares en détails. Le suspense et la tension, omniprésents, suivent le crescendo qu’on attendait désespérément jusque-là.


Quelques facilités scénaristiques sont regrettables (Peter qui souffre d’une grippe, le coup classique, qui vient certainement compenser le fait que son affaiblissement moral et physique n’est pas franchement évident), mais l’histoire reste imprévisible, chose qu’on n’avait plus vue depuis longtemps dans les pages d’Amazing spider-man. Bien sûr, certains retournements de situation sont évidents, mais globalement, on reste surpris, et surtout épuisé par le rythme démentiel de cette histoire en 4 épisodes. Kelly ne se perd jamais en discours inutiles et va à l’essentiel, tapant dur, rendant son récit viscéral, s’assurant ainsi que le lecteur a peur pour les héros et attend désespérément la catharsis. Enfin, le retour de Kaine devient utile, et enfin, on voit Peter se comporter en homme. Cet arc nous rappelle également que les meilleures aventures de l’homme araignée ne sont pas celles écrites pour les enfants, où tout est rose et où on sourit constamment, mais bien les plus sombres et les plus dramatiques. Spider-man a beau être un héros plus léger qu’un Daredevil, il connaît lui aussi la tragédie au quotidien, et c’est lorsqu’elle frappe qu’il se montre le plus convaincant et le plus attachant.(Bien sûr, certaines histoires sérieuses sont ridicules et figurent parmi les pires aventures du héros « the other » tout le monde ?).

« Grim Hunt » est une expérience éprouvante, qui se vit plus qu’elle ne se raconte, et qui risque de faire parler d’elle encore longtemps. A découvrir absolument !

2 commentaires:

  1. Spidey est un peu abonné aux arcs inégaux je trouve, the other et l'arc de Millar que tu as cité sont des exemples parmi tant d'autres. J'avoue que je ne trouve plus trop d'attrait aux aventures de l'homme-araignée, à trop essayer de plaire à tout le monde, on perd son identité, son âme (pas vrai Méphisto ?) et son charisme. Et ici encore, je ne trouve pas le synopsis très original, pour ma part j'attends toujours désespérémment le scénariste qui saura faire quelquechose de passionnant d'un spider-man.

    RépondreSupprimer
  2. oui,je suis ben d'accord.Millar a livré une histoire relativement classique mais bien écrite et non dénuée de suspense malgré tout. Le pitch de the gauntlet est à la hauteur des histoires: médiocre. Mais grim hunt, qui reste plutôt classique, est l'opposé: extrêmement bien dessiné, narré avec une intensité remarquable, et bourré de scènes marquantes. Si tu as l'occasion de lire juste cet arc, je te le conseille vivement!

    RépondreSupprimer