On peut voir dans cette chronique un coup de gueule. Comme beaucoup de joueurs, j’ai beaucoup attendu Alan Wake, annoncé il y a déjà 5 ans sur la xbox 360. C’est Remedy, l’équipe derrière les deux premiers Max Payne, qui s’est occupée du développement. Dès les premières images, on sentait la volonté de livrer un produit différent. Le cadre surprend à lui seul : de grandes forêts de sapins, une petite ville au bord d’un lac…. Il est évident que les créateurs ont cherché à recréer une ambiance à la Twin Peaks. D’ailleurs, la sérié créée par David Lynch et Mark Frost, ainsi que Stephen King, sont cités comme les sources d’inspiration principales de l’histoire.
Passionné par le projet, je me suis procuré l’édition collector, en particulier pour lire le « Alan Wake Files », un livre de 144 pages, contenant des annotations d’un agent du fbi enquêtant sur les événements du jeu, ainsi que deux nouvelles écrites par Alan Wake, puisque notre héros est un écrivain en panne d’inspiration. Sa femme l’emmène à brightfalls pour l’aider, elle disparaît, Wake a oublié toute une semaine, et une force sombre prend possession des gens la nuit… Voilà un peu le contexte. S’inspirant du découpage des séries tv, « Lost » en tête, Alan Wake rappelle forcément le dernier « Alone In The Dark ».
La gestion du rythme est donc un des éléments prépondérants, et de ce point de vue, la construction est plutôt réussie. Les premiers instants sont brillants : au-delà de l’aspect graphique incroyable, l’ambiance est exceptionnelle, et on se sent immergé dans ce petit coin étrange. Les mécaniques de jeu sont classiques mais efficaces, et la redondance n’est pas vraiment dérangeante, même si on regrette qu’il n’y ait pas davantage de « gros » passages.
Malheureusement, pour moi Alan Wake est un bon jeu, mais pas une œuvre inoubliable qui méritait un buzz de 5 ans. Ce qui en soi ne serait pas dérangeant si les pros Alan Wake (j'entends par là ceux qui décrivent ce jeu comme le messie) ne jouaient pas les élitistes et ne dénigraient pas tout le reste de la population des joueurs. En effet, on lit systématiquement que ceux qui n’ont pas aimé le jeu, ou qui ne le portent pas aux nues, sont des incultes qui n’ont pas la culture nécessaire pour apprécier les nombreuses références du jeu. De même, ceux qui ont le malheur d’aimer les jeux comme « Call Of Duty » ou « Red Dead Redemption » sont taxés de kékés voire pire. J’estime que l’art est subjectif. Pour moi, il n’y a pas de vérité, juste des appréciations, mais ces insultes répétées m’ont donné l’envie de détailler les raisons qui me poussent à trouver Red Dead Redemption non seulement plus ambitieux, mais aussi plus réussi qu’Alan Wake.
Chez Remedy, les références du jeu sont populistes. On nous parle de noms que tout le monde connaît, on nous assène des références qu’on trouve sur n’importe quel forum, qu’il soit professionnel ou non, et on le fait surtout de façon très maladroite. On peut même dire qu'elles nous sont vulgairement balancées en pleine poire et qu'on nous prend pour des ignares. L’un des meilleurs exemples est cet agent du FBI qui poursuit Wake, et qui ne cesse de l’affubler de surnoms d’auteurs célèbres. Ce personnage témoigne d’un carresage dans le sens du poil navrant, mais aussi des problèmes d'écriture du jeu.
Entendons-nous: je trouve qu'Alan Wake est un bon jeu, aux graphismes magnifiques et à l'ambiance excellente. Mais son scénario, qui devait être son plus grand atout n'est pas convaincant. Les enjeux sont inexistants (dans la mesure où on ne s'attache pas à ces personnages caricaturaux, difficile de se sentir investi, sans parler de l’objectif : retrouver sa femme disparue… original ? Pas le moins du monde !), les dialogues sont très mauvais, les personnages secondaires sont mal exploités et souvent n'apportent rien... d'ailleurs, en lisant « the Alan Wake files », j'ai vraiment eu la sensation que Clay, le narrateur, qu'on aperçoit que dans le prologue du jeu, n'apportait rien. A ce titre, le livre aurait pu, et même aurait du n'être que les notes de l'agent du fbi (qui pour le moment, n'a servi à rien, et vu son destin, on peut se demander s'il apportera davantage dans un éventuel deuxième épisode). En effet, ce fameux Clay n’apporte rien à l’histoire, et sa narration dans le livre n’enrichit pas le propos des notes de l’agent du FBI.
Tous ces détails dénotent un manque de maîtrise de la structure narrative, que le déjà vu des situations ne peut améliorer. La plupart des retournements de situation sont prévisibles, le postulat général n'a rien d'exceptionnel et on le retrouve dans de très nombreux médias (chez King bien sûr, mais aussi dans « l'histoire sans fin 3 », dans le manga « wingman », dans certains comics, comme l'album marvel: "contes étranges"). Les influences sont non seulement évidentes, mais constituent l’essence d’un jeu à l’identité instable, fragile… A tel point qu’une fois le dernier épisode achevé, je n’ai pas eu envie de recommencer, et surtout, je ne me suis pas posé davantage de questions sur une intrigue qui laisse pourtant quelques questions en suspens. Je suis pourtant amateur des intrigues complexes, lorsque les pistes me semblent cohérentes et en phase avec le récit, mais surtout lorsque les personnages sont suffisamment attachants pour que je m’attache à eux. Ici, le tout m’a semblé plus artificiel, je n’ai jamais eu la sensation d’assister à l’élaboration d’un univers à part, et le côté très monolithique des personnages ne m’a pas convaincu. J’en veux pour preuve le personnage de Barry, le meilleur ami, ridicule, caricatural, et aux réactions incohérentes et à la limite de la parodie. Il n’est malheureusement pas le même à bénéficier de ce traitement, et le héros, le fameux Alan Wake, est bien trop lisse pour intéresser.
La comparaison avec Red Dead Redemption n'est bien sûr pas pertinente, puisqu'il ne s'agit pas du même type de jeu. Néanmoins, si on s’attarde sur le jeu de Rockstar, on trouve un souci du détail qui enrichit largement le propos. Avant tout, on a l'impression d'être le témoin de la fin d'une époque, ce qui bien sûr favorise l'immersion. Mais surtout, tous ces petits éléments, toutes ces quêtes secondaires, permettent de cerner l'époque, le contexte, la mentalité, et surtout notre protagoniste. L'incursion subtile d'un personnage qui en sait long sur le personnage apporte une dimension complexe et inattendue à une œuvre qui se présente comme plutôt réaliste.
La trame de départ, qui n'est pas sans rappeler le scénario de "la proposition" -western australien crépusculaire réalisé par John Hillcoat et mettant en scène Guy Pearce - bénéficie d'un rythme extrêmement travaillé. L'action n'est pas omniprésente, ce qui permet de prendre du recul et d'apprécier la réflexion sur la violence qui est au centre du récit. La dramaturgie est exceptionnelle, confrontant le jouer à des situations déchirantes, parce qu'il a appris à aimer les personnages, et qu'il se sent impliqué par leur destin. Le final, très ancré dans les héroic bloodshed chers à Sam Peckinpah, mais qui rappelle également le tragique "grand silence " de Sergio Corbucci achève de faire de Red Dead Redemption une œuvre complète, complexe et poignante, dont les références sont brillantes, mais ni assenées à coup de maillet, ni indispensables pour apprécier le jeu.
Là où Alan Wake reste un jeu de Geeks où les références pullulent grossièrement sur une trame usée et sans intensité dramatique. Alors oui, Red Dead Redemption mérite largement d'écraser Alan Wake en termes de vente pour moi. Et j'insiste sur le "pour moi", car tout ceci n'est qu'un avis.
Voilà ce que j'appelle une analyse intéressante. En ce qui me concerne, je n'ai pas encore eu l'occasion de jouer à l'oeuvre de Rockstar. Par contre, j'ai joué et fini Alan Wake depuis un moment déjà (acheté en collector également !) et j'avoue partager assez tes sentiments vis à vis de ce jeu.
RépondreSupprimerTant sur la forme que sur le fond, le jeu est bon mais pas exceptionnel.
Les mécaniques de gameplay sont relativement basiques et répétitives. Bien que joliment mises en scènes, les phases d'action du titre ne sont absolument pas marquantes mis à part la scène du concert. On est quand même bien loin d'un Resident Evil 4 qui enchaînait les scènes d'anthologies. De plus, le jeu est incroyablement linéaire et Alan Wake est assez rigide dans sa maniabilité, défauts qui ne m'ont pas gênés plus que ça mais qui ont été vivement reprochés sur d'autres titres (FF13 pour la linéarité, Resident Evil 5 et Dead Rising 2 pour le côté rigide). De plus, le jeu ne nous épargne pas la quête additionnelle inutile par excellence, celle qui consiste à trouver 100 "trucs" (en l’occurrence des thermos) qui n'a pas d'intérêt ludique sauf celui de débloquer un succès dont je me fiche royalement.
Pour ce qui est du background, ce n'est pas tant le scénario qui me donnait envie de continuer le jeu mais surtout l'ambiance du titre absolument remarquable avec un magnifique travail sur les ombres et la lumière. Comme tu l'as bien dit, les personnages sont peu intéressants car manquant notamment de profondeur et les références nous sont vulgairement balancées aux visages alors qu'elles sont visibles comme le nez au milieu de la figure.
En me relisant, je m'aperçois que j'ai oublié d'aborder 2 autres points.
Le 1er concerne le découpage en épisodes, procédé sympathique mais totalement superficiel. Cela aurait été intéressant si le jeu était effectivement vendu en épisodes sur le live.
Enfin, j'ai clairement eu la sensation que le jeu était étiré au maximum afin d'atteindre la durée de vie "standard" d'un jeu d'aujourd'hui payé 60-70€. La preuve dans le dernier chapitre dans lequel on revient en voiture au point de départ de l'aventure. Et là comme par hasard, la route est inaccessible en voiture, on fait alors un détour à pieds et, oh surprise !, une voiture nous attend à la fin de ce détour. Et rebelote, 2 minutes de jeu plus tard on doit à nouveau prendre un détour à pieds :/
Voilà, je crois avoir à peu près tout dit. Malgré mes critiques, je trouve néanmoins qu'Alan Wake est un bon jeu mais ce n'est pas un grand jeu, lin de là !
Voilà un commentaire qui fait plaisir, déjà parce qu'il prolonge le débat, et ensuite parce que je me sens moins seul.
RépondreSupprimerEncore aujourd'hui, on peut lire un peu partout que si le jeu n'a pas marché, c'est parce qu'il est "trop complexe", que les joueurs ne "sont pas assez intelligents".
Je ne m'explique pas ces invectives, car l'histoire d'Alan Wake n'a rien de complexe et est même très basique pour de du fantastique. On est loin de la complexité d'un silent Hill par exemple.
D'ailleurs, je me rends compte que j'ai oublié de pointer un élément important: ce qui manque le plus à Alan Wake, c'est l'émotion. Alors qu'on veut nous faire vibrer, puisque le point de départ est la disparition de l'épouse, je ne me suis jamais réellement senti investi, et comme toi, ce qui m'a poussé à continuer, c'est l'ambiance qui est par contre exceptionnelle et constitue le gros point fort du titre.
Pour revenir à la comparaison, je te conseille vivement Red Dead, dont la durée de vie est plus importante, et qui parvient à mêler une histoire principale poignante (pour le coup l'émotion est de mise et ne parait jamais artificielle, grâce à une écriture de grande qualité), et des quêtes secondaires prenantes. de plus, certains missions annexes approfondissent de façon intéressante les thématiques de la violence de se son cycle. Le cadre est parfaitement exploité, ne serait-ce que visuellement, avec une plongée inoubliable dans le crépuscule du vieil ouest, mais aussi thématiquement. Le propos est cynique, comme souvent avec rockstar, mais évite la complaisance facile par un nihilisme aussi surprenant que bienvenu, qui évite les écarts très clichés du genre.
En conclusion, comme toi je trouve qu'alan Wake est un bon jeu, qui possède des qualités indéniables, mais qui reste plutôt anecdotique finalement (et le premier dlc ne vient pas contredire ce jugement), qui ne mérite pas à mon sens qu'on en chante les louanges davantage que d'autres jeux qui ont bénéficié d'un oeil moins bienveillant de la part des critiques.
Par exemple, Silent Hill Homecoming s'est fait massacrer par presque tout le monde, alors qu'en dépit de ses défauts il propose une intrigue bien plus travaillée qu'alan Wake. Je vais sans doute me faire lyncher pour de tels propos, mais la publication d'un article détaillé sur ce titre légitimera mon opinion personnelle à ce sujet.
Enfin, Red Dead Redemption a bénéficié d'un marketing impeccable, mais son succès n'est pas dû à son seul statut de blockbuster: le plaisir de jouer est évident et intense, le contexte parfaitement exploité, le rythme incroyable (ne reposant pas que sur l'action, mais ménageant des moments de calme qui profitent à la tension dramatique), l'écriture de grande qualité, pour une histoire pas des plus complexes, mais intense, triste, prenante.... une expérience qui se vit en somme!
C'est vrai également que question émotions c'est pas trop ça non plus.
RépondreSupprimerEt si les joueurs 360 argumentent que le jeu est trop "complexe" pour avoir du succès c'est parce qu'ils bouffent des TPS et des FPS à longueurs d'année donc forcément un jeu comme Alan Wake à côté :sifflote:
Concernant, Red Dead j'y jouerai certainement un jour mais ce n'est pas ma priorité. N'étant pas spécialement fan ni des Westerns, ni des mondes ouverts à la GTA. Mais concernant la qualité d'écriture de Red Dead je ne me fais guère de soucis, Rockstar ayant souvent assuré dans ce domaine même si, selon moi, le côté bac à sable de leurs jeux empêchent de rentrer totalement dans leurs histoires.
Hahaha, c'est certainement un argument, et ils accusent ceux qui sont déçus du jeu:
RépondreSupprimer- d'être des trolls
- d'être des joueurs de ps3 exclusivement
- de ne pas avoir essayé le jeu
- de ne pas en avoir compris la complexité
- et enfin l'attaque ultime, d'être des kevin qui ne jouent qu'à Call Of Duty.
J'aime bien ce côté dénigrant et élitiste, plein de jugement, à défaut d'une argumentation construite.
Je comprends qu'on craigne que le côté bac à sable dédramatise la tension d'un jeu. De mon côté, ça ne m'a gêné ni sur Assassin's creed 2 (que j'ai adoré), ni sur gta 4 et Red Dead Redemption (ce dernier en particulier d'ailleurs).
Tu as des attentes dans les jeux sortant prochainement?
Je vois que tu as parfaitement cerné la mentalité du gamer d'aujourd'hui :D
RépondreSupprimerDans les prochaines sorties, je t'avouerai que sur les consoles HD je n'attends rien de particulier à court terme. Par contre sur Wii, plusieurs jeux m'intéressent : Epic Mickey, Donkey Kong Country Returns et Sonic Colours (pour info, je suis un gros fan de Sonic ^^ )Et sur PC, j'attends Football Manager 2011 avec impatience :)
Sur ce, je vais aller me mater "The Dark Knight" en blu-ray ;)
Bon programme en perspective. Et soirée de folie en vue!
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