mercredi 16 février 2011

Big Tits Zombies

Dire du cinéma japonais qu’il fait dans la dentelle ne reflète pas tout à fait l’image généralement associée au 7ème art nippon. Bien sûr, on ne peut pas généraliser sur la base de quelques dizaines (voire quelques centaines pour les fans) d’œuvres parvenues jusqu’à nous. Après tout, il n’y a pas un genre japonais, mais des genres. Cependant, du dessin animé au Yakuza eiga, en passant par la comédie ou le fantastique, on constate des points communs. Une vision de la narration très différente de ce qu’on trouve en occident. La culture d’un pays a de toutes manières un impact évident sur le traitement du média, et c’est bien pour cette raison qu’une grande culture otaku s’est développée en France. Des réalisateurs comme Takashi Miike se sont fait les spécialistes d’un cinéma autre, expérimentant davantage dans le v-cinéma (l’équivalent japonais du direct to video), plus libre. Des réalisateurs comme Yudai Yamaguchi, Yoshihiro Nishimura ou Noburo Iguchi se sont fait les spécialistes de séries B qu’on pourrait qualifier de basique, dont le principal intérêt reste l’explosion d’hémoglobine. De ce point de vue, ces œuvres sont généreuses, et on ouvert la voie à toute une sous industrie pas toujours très consciencieuse. Takao Nakano, qui s’est fait une spécialité des films à petit budget un rien racoleurs, s’inscrit plus dans l’héritage des profiteurs mercantiles que des artisans passionnés avec son Big Tits Zombies. Les titre original est identique à celui de la bande dessinée adaptée, mais les autres noms sont nettement plus racoleurs, tout comme l’ensemble du marketing du film. Il suffit d’observer les affiches pour comprendre les intentions des producteurs : mélanger des morts-vivants et des jeunes femmes en tenues légères serait une formule gagnante. Pour certains, le simple fait qu’un film soit indépendant est signe de qualité. Si en plus il s’agit d’une production asiatique, alors on est certains de pouvoir crier au miracle, car c’est évident, contrairement à toutes ces grosses productions aseptisées hollywoodiennes, le propos est sincère ! Or, Takao Nakano met toute son énergie pour démontrer à quel point le cinéma « autre » peut se contenter d’accumuler les clichés et jouer sur des arguments faciles, au détriment d’un vrai sens de la narration et d’une histoire digne de ce nom. Si la firme Troma, célèbre studio indépendant américain, fait également dans le racoleur, des œuvres comme Poultrygeist ont le mérite d’être jusqu’au boutistes et de développer un vrai message, aussi peu subtil soit-il !


Le cinéma d’exploitation a connu ses heures de gloire dans les années 70, et en 2007, Robert Rodriguez et Quentin Tarantino lui ont rendu hommage avec leur dyptique Grindhouse. Depuis, il n’est pas rare de voir des petits productions surfer sur ce qui est devenu une mode, alignant les effets de montage censés monter que la pellicule est abîmée, ainsi que les musiques datées et les thèmes sexuels outrés. En bon recycleur, Takao Nakano va donc exploiter cette recette avec un souci du détail anémique, dans une introduction sans intérêt. A ce titre, les fameux effets grindhouse ne seront exploités que dans l’introduction, et on ne peut que s’en réjouir, tant le rendu est mauvais et semble hors de propos. La volonté de souligner les différentes inspirations, ou peut-être le manque d’idées conduisant au plagiat pur et simple, va pousser Takao Nakano à construire sa chronologie de façon identique à celle du Machine Girl de Noboru Iguchi. L’occasion de contempler la première, mais aussi l’une des seules, scènes d’action. Et le constat est sans appel : chorégraphie flemmarde et actrices qui ont plus l’habitude de mimer les scènes d’amour que les combats, le résultat est médiocre. Sora Aoi, héroïne principale, nous gratifie de plusieurs coups de pied retournés franchement pathétique, sans puissance et sans souplesse. Mais ce n’est manifestement pas ce qui intéresse le réalisateur, qui préfère enchaîner les gros plans sur l’entrejambe de son interprète, afin qu’on puisse distinguer ses sous-vêtement sous son short. L’hémoglobine n’est pas non plus convaincante, à cause du choix douteux du sang numérique. Là où la plupart de ses congénères préfèrent les maquillages à l’ancienne, plus viscéraux et jouissifs, Takao Nakano semble ne pas savoir sur quel pied danser. Il privilégie le numérique, probablement par facilité, mais certaines scènes bénéficieront de maquillages plus traditionnels et bien plus sympathiques. Ce manque de pertinence dans les choix artistiques est certainement ce qui caractérise le plus ce Big Tits Zombies, comme en témoigne la chanson titrée « Vampire », qui accompagne le générique. Et comme si le retour en arrière, destiné à expliquer l’épidémie zombie ne suffisait pas, on nous gratifie d’un nouveau retour en arrière, afin d’expliquer la présence de l’héroïne dans un club minable. En plus d’être inutile, et de ne rien apporter au développement du personnage, cette scène devient rapidement ennuyeuse. Tous ces choix douteux mettent exergue le manque de consistance d’un récit sans enjeux. Sachant qu’il s’agit de l’adaptation d’une bande dessinée, on imagine que le nombre de volumes devait être assez réduit pour que le réalisateur n’ait à ce point rien trouver à raconter. Sur une durée de 1h10, il réussit à livrer un produit (car c’est bien de ça qu’il s’agit) suffisamment plat pour qu’on regarde sa montre à plusieurs reprises. Car à part nous montrer des disputes puériles entre les danseuses, ou d’autres excuses tout aussi insipides pour les filmer avec vulgarité, il ne sait pas quoi développer. En comparaison, le Zombies Strippers avec Robert Englund et Jenna Jameson, qui possédait son lot de scènes ennuyeuses et passait la majorité de son temps à montrer des « spectacles », présentait une introduction et une conclusion de qualité, qui suffisaient à satisfaire le fan de tripailles. Ici, il faudra supporter 45 minutes pour arriver laborieusement à l’invasion des 6 ou 7 zombies qui peuplent le film.



Les rares scènes qui pourraient paraître un peu plus ingénieuses ne sont non seulement pas bien exploitée, mais sont en plus reprises d’autres films. On pense notamment à l’éveil des sushis zombies, directement volés du Flic Ou Zombie avec Treat Williams et Joe Piscopo. En plus d’avoir limiter ses recherches pour la mise en scène au plagiat, le réalisateur enchaîne les clichés, allant jusqu’à faire dire à une des danseuses que boire de l’alcool réchauffe (quand on sait très bien qu’au contraire il refroidit le corps). Ne parlons pas des héroïnes, qui n’ont aucune personnalité, défaut que le jeu médiocre des actrices ne peut absolument pas compenser. Bien sûr, on pourra argumenter que ce genre de petite production est basée sur e fun immédiat, et l’enthousiasme de l’équipe. Mais bien trop souvent, tous ces éléments sont de simples excuses pour mettre en boite des produits faits à la va-vite, sans aucune conscience professionnelle, et sans aucun professionnalisme d’ailleurs. Big Tits Zombies n’est même pas du niveau de certains courts ou moyens métrages que l’on peut trouver sur youtube ou dailymotion. Pourtant, on a envie d’y croire. Quand une vive lumière éclaire une tronçonneuse, on se prend à sourire, et à espérer que le massacre qui va suivre sera généreux en hémoglobine. Mais dès que les morts-vivants se présentent, on comprend qu’il n’y aura pas de rédemption. Il n’y a en effet aucune unité dans le traitement des zombies. Certains portent des masques d’halloween, d’autres des couches de maquillages, d’autres encore, une légère touche de maquillage… le je m’en foutisme général est flagrant et on n’a jamais l’impression que le réalisateur respecte son public. On peut même considérer qu’il se fiche de nous, lorsque le combat final n’est rien d’autre que la scène qu’on a déjà vue en introduction. Identique au plan près. Sur une durée de 1h10, on nous présente donc 2 fois la même scène de 5 minutes. Ce n’est plus du système D, c’est de l’escroquerie. D’autant plus que le récit, déjà peu prenant et peu convainquant, enchaîne les mauvaises idées, comme le retour en zombie de la sœur de l’héroïne, pourtant morte bien loin du lieu de l’action. La fin va quant à elle tenter de capitaliser sur les quelques références balancées de façon aléatoire, reprenant son compte la fameuse réplique de Dawn Of The Dead, « Quand il n’y a plus de place en enfer, les morts reviennent sur terre », le temps d’une blague amusante. C’est finalement la très niaise réplique « love is wonderful » qui va clore ce qui est plus un navet qu’un nanar, quoi que le réalisateur essaie de nous faire croire.



Big Tits Zombies est un divertissement ennuyeux, qui surfe sur plusieurs modes sans jamais convaincre, et qui se fiche de ses spectateurs, jugeant qu’il suffit de balancer quelques idols en petite tenue pour les contenter. C’est à cause de ce genre de films que le grand public a une mauvaise image des morts-vivants, et le décrire comme une œuvre fun et décomplexée, c’est refuser de voir l’escroquerie dont on a été victime durant 1h10. a éviter.

1 commentaire:

  1. Tiens c'est marrant, il est sur ma liste de films à voir celui-là :D

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