mardi 31 août 2010

Guide de survie en territoire zombie

Pour ce 100ème article, je vais parler d'un livre que j'affectionne parculièrement, et qui prouverait aux détracteurs des zombies, s'ils prenaient la peine de le lire, que les morts vivants méritent qu’on apprenne à les connaître !

Tout le monde (ou presque) connaît Mel Brooks, le créateur de films tels que « la folle histoire du monde », « la folle histoire de l’espace », ou encore « sacré Robin des bois » et « Dracula, mort et heureux de l’être ».

En France, nous sommes certainement moins nombreux à connaître Max Brooks, fils de l’illustre réalisateur, qui a choisi une voie un peu différente, quoi que pas si éloignée de l’héritage paternel. S’il a fallu attendre chez nous l’année 2009 pour profiter d’une traduction de son travail, l’auteur est connu aux Etats-Unis depuis le début des années 2000. C’est en 2003 que parait là-bas l’œuvre qui nous intéresse.


« Guide de survie en territoire zombie » est un traité rédigé avec le plus grand sérieux. Son titre résume parfaitement son contenu, puisqu’on y apprendra en détails comment se comporter pour évoluer avec le moins de danger dans un monde envahi par les morts-vivants. Prenant la forme des guides de survie traditionnellement réservés aux campeurs de l’extrême ou aux chasseurs de l’enfer, l’œuvre tire son humour d’un ton aussi sérieux que crédible.

La construction des chapitres permet une organisation claire, même si elle n’évite pas quelques répétitions, indispensables, puisque selon la configuration du lieu où l’on doit survivre, on retrouve quelques tactiques communes. L’auteur semble s’être beaucoup documenté, car la description minutieuse de chaque arme (et dans de telles circonstances, tout peut devenir une arme, comme pourra en témoigner n’importe quel joueur de « Dead Rising »), et il importe d’être capable de choisir bien. Si les films privilégient les armes à feu, Brooks les déconseille, estimant que leur puissance de feu n’a d’égal que leur manque de discrétion.

Or, l’intérêt du livre est d’être contextualisé dans un univers crédible, à défaut d’être vraiment réaliste. Ainsi, on apprendra à privilégier les moyens de défense et de transport silencieux. On évitera de trop se montrer. On pensera à ce que l’on peut porter sur soi, ce que l’on doit absolument conserver en toute circonstance. On détaillera les endroits à éviter, ceux à privilégier, et surtout on n’oubliera pas qu’en cas d’invasion, l’endroit sûr n’est qu’une utopie. Avec un peu d’expérience dans le film de zombies, on reconnaîtra rapidement les situations classiques, les pièges que les personnages n’évitent jamais alors qu’ils nous paraissent évidents… La passion de Brooks pour le genre est évidente, et c’est avec beaucoup de sérieux qu’il livre une œuvre dont la couverture fera immanquablement rire ceux qui pensent que les amateurs de zombies ne sont que des ignares puérils, mais dont le contenu et la qualité tant de l’écriture (qui est plus technique que littéraire, mais le genre l’impose) que de la recherche documentaire prouveront qu’avec du travail et de l’imagination, le mort vivant est un sujet très riche.


La lecture peut cependant paraître fastidieuse si l’on n’est pas réellement passionné par les goules et les façons d’en venir à bout, ou du moins de ne pas en être la victime. Car il s’agit bien de survie, et non de massacre aussi héroïque que surfait. Un point largement appuyé tout au long de la démonstration, et qui contribue à apporter une crédibilité bienvenue à l’ensemble.

Mais l’auteur ne se contente pas de livrer un manuel. Il s’intéresse aux différents mythes entourant le mort vivant, commençant par décrire celui du vaudou (qui reste la première explication connue, comme en témoigne le premier écrit sur la question : l’ouvrage d’ethnologie « Magic Island » de William Seabrook, paru en 1929, et adapté librement pour le premier film de zombie « white zombie » avec Bela Lugosi, dont la critique est lisible sur ce blog) avant d’expliquer pourquoi il ne s’agit que d’un mythe. La cause de zombification retenue est plus en phase avec les films récents, où il est bien souvent question d’un virus, le solanum, qui envahit la circulation sanguine, en générale par le biais d’une blessure (souvent causée par une morsure de zombie, mais pouvant également se transmettre par frottement de plaies). Personnellement, j’aime assez l’idée du vaudou zombie, et je pense qu’on peut imaginer les deux visions coexister, mais le parti-pris de l’artiste est défendu avec conviction, et largement justifié pour des raisons de cohérence générale.

Et c’est bien là le point sur lequel on ne prendre pas Brooks en défaut : l’ensemble est minutieusement élaboré et décrit, à tel point qu’on en viendrait presque à croire que l’invasion est non seulement possible, mais imminente. Bien sûr, avec la description des différentes catégories d’épidémie, on pourrait penser que ce genre d’invasion a déjà eu lieu, sur des échelles relativement restreintes. D’ailleurs, le dernier chapitre, qui recense des épidémies passées est passionnant. Sans céder à la facilité du pur récit littéraire, l’écrivain relate des faits historiques sordides en les inscrivants dans la théorie de l’attaque zombie, soit étouffée, soit oubliée, soit mal comprise, mais toujours réelle dans le cadre du livre. Et toujours crédible dans le cadre du récit.


Cette dernière partie, qui s’éloigne un peu du contexte général du guide de survie donne largement envie de se plonger dans le « World War Z » de l’auteur. On ne peut pas à proprement parler de suite, mais il s’agit d’une succession de témoignages de survivants d’une invasion mondiale de morts vivants. Après la théorie, l’issue de la pratique en quelque sorte. A noter que la société de production de Brad Pitt a acquis les droits d’adaptation de « World War Z » l’an dernier, pour une sortie prévue en 2012 (espérons que ce soit avant le 21 décembre). Brooks a déclaré qu’il n’imaginait pas le film autrement que comme « le seigneur des anneaux du film de zombies ». Un propos qui ne peut que réjouir et susciter les fantasmes les plus fous, et la popularité de l’acteur aidant, on se prend à rêver d’une reconnaissance réelle d’un genre qui, bien exploité, peut être extrêmement intéressant.

Avis aux amateurs, un livre original, qui ne surprendra peut être pas, mais porte un regard passionné et passionnant sur nos morts vivants !

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