vendredi 27 novembre 2009

Le procès de Oui Oui Chapitre 3

Chapitre 3 - L'ignoble vérité









Les forces de l’ordre vont encore le pourchasser. Il doit d’abord atterrir quelque part, se déguiser, et se rendre à pied chez le gnome. Sinon on le repèrera trop facilement. Il ne peut pas rentrer chez lui, on doit l’y attendre. Et tous les magasins sont fermés. Il n’a pas le choix, il doit rentrer par effraction dans l’un d’eux. Habillé tout en noir et déguisé d’un passe-montagne, il se faufilera plus facilement.




Sautant de toit en toit, il finit par atteindre celui de la maison de son ami. Il n’a qu’à passer par la cheminée pour rentrer. Ainsi, personne ne le verra. La chute est plus spectaculaire qu’il ne l’aurait cru. Heureusement qu’il est fait de bois, ou bien il se serait vraiment fait mal ! Par ailleurs, le bois étant un combustible à l’efficacité redoutable, notre héros ne peut qu’être heureux que personne n’ait eu l’idée d’allumer un feu !A présent, il lui faut être minutieux afin de découvrir ce qui pourrait pousser quelqu’un à vouloir assassiner un innocent comme Potiron. Les lieux ont déjà été retournés par les forces de l’ordre, mais lui seul connaît suffisamment son ami pour deviner ses cachettes…



Personne ne s’était jamais demandé comment un réfrigérateur de tailler normale pouvait assouvir la faim Gargantuesque du gnome. Personne à part Oui-oui. Il avait un jour découvert que le meuble réfrigérant en question n’était qu’un leurre. En actionnant une manette, on découvrait une entrée juste derrière. Le pantin n’avait jamais eu l’occasion de s’aventurer plus loin. Son ami était toujours arrivé juste avant qu’il n’ait le temps de s’engouffrer dans l’ouverture. Il va enfin percer le mystère, même s’il est certain de trouver des vivres pour des mois…



Le garçon de bois avance à tâtons dans l’obscurité, cherchant désespérément l’interrupteur salvateur qui lui permettra de poursuivre ses investigations. Soudain, la porte dérobée se referme, le laissant dans le noir le plus complet. Il lui faut absolument trouver la lumière pour sortir. Sentant son rythme cardiaque s’accélérer, il s’arrête de chercher quelques instants pour reprendre son souffle et se calmer. Finalement, ses doigts atteignent la surface si ardemment attendue. Quelle n’est pas sa surprise lorsqu’il constate l’absence totale de nourriture. Au lieu de ça, des piles de papier inondent la pièce. Il s’agit de tracts. Des tracts politiques.



Oui-oui se sent trahi au plus haut point en comprenant que celui qu’il avait toujours considéré comme son meilleur ami n’était autre que son pire ennemi : un gauchiste ! S’il avait découvert cela quand son ami était encore en vie, il l’aurait peut être tué lui-même.Mais les choses ont beaucoup changé en quelques heures, et le nain n’est plus certain de savoir en quoi croire.



Il doit y avoir autre chose cependant. Hormis les tracts et les T-shirt ornés d’une étoile rouge, il trouve un cahier… ou plutôt un journal… le journal de Potiron….





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Les vacances d’été approchent à grand pas, le temps est là pour en témoigner. C’est une époque que j’affectionne particulièrement. Elle me rappelle les vacances en famille de mon enfance, mais aussi les après-midi entre copains au bord de la plage, les flirts… Tout ça paraît tellement loin… Quand je repense à tout ça et que je vois le nombre de personnes qui vivent dans la misère… pourquoi tous les enfants n’auraient pas le droit de profiter d’été aussi beaux que ceux que j’ai connus ? Oui-oui aime beaucoup l’été lui aussi, mais parce qu’il a plus de clients et qu’il peut travailler encore plus…Tout ça me paraît tellement injuste… mais que puis-je y faire ? J’aimerais changer les choses, mais je ne sais pas par où commencer. Je me sens tellement inutile, tellement égoïste…Je ne peux plus continuer comme ça. Je ne peux plus me satisfaire de cette vie, rester les bras croisés en sachant que des gens, des enfants souffrent. Je vais trouver quelque chose….




Vendredi 13 juin




Aujourd’hui, j’ai parlé à Oui-oui de ce que je ressentais, de l’injustice de lois qui refusent aux gens d’échapper à leur destin… Il m’a répondu qu’on ne pouvait pas accepter que ces gens viennent « chez nous » sinon ce serait la porte ouverte à tout. Tout le monde viendrait squatter chez nous et ça ne serait pas juste. Il est bien content d’avoir plus de monde à conduire dans son taxi, mais il ne veut pas partager autre chose…Il n’a rien compris. Pourquoi serait-on plus chez nous ici qu’eux ? Parce que nous y sommes nés ? Pourquoi serions-nous propriétaires d’un endroit ? La terre n’appartient à personne. Ces gens n’ont pas mérité de vivre dans la misère. On leur refuse un avenir meilleur, et sous quel prétexte ? Ils sont nés ailleurs. Coupables d’être nés ailleurs…Et on vient nous parler de justice. Ça me rend malade. Mais ce qui me rend fou, c’est d’entendre des gens prendre leur pied en sachant qu’on renvoie ces malheureux dans des pays où le seuil de pauvreté atteint des cimes incongrues… Comment peut-on se laver les mains de la souffrance comme ça ? Cette fois, c’est décidé, il faut que je fasse quelque chose…






Vendredi 4 juillet




Ce voyage m’a fait beaucoup de bien. J’avais besoin de voir de mes yeux cette souffrance que je connaissais de loin. Quiconque voit ça ne peut se sentir indifférent. Si seulement la population avait conscience de tout ça… de cette chance que nous avons… J’ai pu rencontrer des gens fascinants… des gens qui m’ont donné des idées. On ne changera pas les choses sans bouleversements… Tant que l’économie primera, des gens comme Oui-oui continueront de ne se soucier que de leur petite personne. Si tout ça est tellement injuste, c’est parce que c’est l’argent qui gouverne. Si on renverse le pouvoir et qu’on met fin à ce culte de l’argent, on pourra enfin commencer à penser aux autres. Mais je ne peux pas faire ça seul. Je dois organiser un putsch dans les règles. Et pour ça, il me faut de l’aide. Je dois être discret. Tant que nous ne serons pas assez pour remporter la victoire, personne ne doit être au courant de mon projet. Je vais m’infiltrer dans les quartiers les moins aisés. Là où les gens doivent se battre pour survivre. Leur désespoir sera le moteur de notre révolution. Ils voudront aider ceux qui souffrent encore plus qu’eux…


Mardi 8 juillet
J’ai déjà commencé à me faire des connaissances parmi les populations les plus défavorisées de la ville. Mais contrairement à ce que je croyais, ils n’ont pas l’air intéressés par le sort des malheureux qui viennent ici. Seule leur propre misère semble leur importer. Qu’à cela ne tienne, j’utiliserai leurs propres arguments pour les convaincre de m’aider. Ce n’est pas un procédé qui me plait, mais ils bénéficieront également des progrès de notre nouveau système. Il faut que je continue à les motiver, pour le moment, il est trop tôt pour lancer une attaque…En rentrant, j’ai rencontré Mr Culbuto. J’ignore comment, mais il avait l’air de savoir pourquoi j’étais là-bas. Je ne sais pas encore si je devrais tout lui dire, ou s’il peut s’agir d’un piège…

Vendredi 11 juillet
J’ai été repéré par des hommes de main des boites qui emploient mes camarades de la révolution. Ils me prennent pour un activiste qui cherche à couler leurs commerces. Je dois être prudent. Je vais me faire discret quelques temps. Une révolution ne se fait pas en 1 mois, et je dois être sûr de moi pour la réussir. Tant que ces hommes seront après moi, je ne pourrai pas me concentrer sur ma tâche. Par chance, ils ignorent qui je suis…

Samedi 12 juillet

Oui-oui est passé me voir aujourd’hui. Je suis un peu inquiet à ce sujet. Il a bien failli découvrir ma cachette. S’il comprenait mon projet, il me dénoncerait certainement. C’est un fervent serviteur de l’Etat. Pour lui, seul comptent l’ordre établi et l’argent… Je n’aurais jamais cru devoir me méfier de mon meilleur ami un jour… mais dorénavant, il va falloir que j’évite de trop le voir…

Vendredi 25 juillet

Depuis deux semaine,, je pense que je suis surveillé. Je vois sans cesser traîner un groupe d’hommes. Je les croise dans tous les endroits qui me sont familiers et ils ne cessent de me dévisager… Ils m’ont peut être découvert, mais je suis sûr qu’ils n’oseront rien faire. Ils essaient juste de m’intimider… Mais mon combat est trop important. Je vais faire profil bas quelques temps, peut être partir à la campagne pour me ressourcer, leur faire croire que j’abandonne… et quand je reviendrai, je serai plus fort ! Il faut quand même que j’aille prévenir les autres avant de disparaître…

Samedi 26 juillet
Impossible de les retrouver ! J’ai eu beau me rendre à tous nos lieux de rendez-vous, je n’en ai trouvé aucun. J’ai même essayé de les attendre discrètement à la sortie du travail, mais impossible d’en croiser un seul… et s’ils les avaient fait disparaître ? Je commence à être inquiet pour ma vie. Les hommes qui me surveillent ne prennent même plus la peine de se cacher : ils restent jour et nui devant ma maison… Je ne peux pas appeler la gendarmerie… je ne dois pas compromettre la révolution pour ma propre sécurité… mais je commence à avoir peur… je me sens seul… je me sens fatigué… La nuit, j’entends des bruits, comme si on essayait de s’introduire chez moi… je n’en dors plus ! Il faut absolument que je m’éloigne…



Dimanche 27 juillet
Oui-oui veut absolument me voir chez lui ce soir. Je ne sais pas pourquoi, il est resté très évasif. Mais je lui dois bien ça. Depuis que j’ai entamé ma mission, je ne lui ai plus consacré de temps, et je ne peux pas partir sans lui dire au revoir. Ça ne me retarde que d’un jour après tout… Même si nous ne partageons plus grand-chose, nous avons été amis pendant si longtemps… et puis il est plus inconscient que méchant. Je vais préparer un sac avec quelques affaires, et je partirai dès que je l’aurai vu. Ce sera plus sûr que d’attendre demain. Et puis il me servira de diversion…>


Le pantin n’arrive pas à en croire ses yeux…lui qui pensait connaître Potiron… il a l’impression de découvrir un inconnu… Il comprend mieux pourquoi son ami était si distant ces derniers temps… Comme il aimerait pouvoir retourner en arrière, discuter avec lui et même, l’aider ! Le Joker et Potiron ont complètement changé sa façon de voir les choses…Le Joker… et s’il était en danger lui aussi ? Mais que pourrait-il y faire ? Pour le moment, c’est lui qu’on poursuit, et on a déjà essayé de le tuer à plusieurs reprises… En plus, il n’a rien trouvé de tangible pour l’innocenter. Le journal de Potiron pourrait orienter les forces de l’ordre vers d’autres pistes, mais ça ne suffirait pas à laver son honneur. Et puis l’assassin (ou les assassins) a pris soin de laisser des preuves incriminant le pauvre Oui-oui sur le lieu du crime…

Au moins, il sait à présent qu’il lui faut s’orienter vers les quartiers défavorisés pour retrouver le tueur. En retraçant le parcours de Potiron, et en se faisant remarquer comme lui, il remonterait la piste et mettrait fin à cette machination… Il lui faudrait envoyer le journal de Potiron au Gendarme par mesure de sécurité…
Alors qu’il sort de la cachette, constate la présence de poils de différentes couleurs sur le carrelage de la cuisine. Alors qu’il se baisse pour le ramasser le réfrigérateur explose, le propulsant à travers la vitre. En se relevant, il constate qu’un homme habillé en combinaison argentée le pointe d’une arme étrange. Le nain a juste le temps de rouler sur le côté pour esquiver la rafale qui lui destinait l’étranger. Il s’élance aussi vite qu’il peut et plonge dans un buisson, espérant obtenir quelques minutes de répit… mais l’individu ne cesse de lui tirer dessus. Oui-oui rampe alors le long du buisson, et se glisse dans un trou bordant la clôture… qui disparaît en fumée après un nouveau tir de son agresseur. Il n’a pas le choix, il lui faut aller en ville. Au milieu de tous les passants, son poursuivant ne pourra pas le retrouver et n’osera pas tirer ! Il n’est qu’à quelques centaines de mètre du boulevard le plus fréquenté ! Prenant une grande inspiration, il se lance dans un sprint épuisant, si bien qu’il est pris de douleurs insupportables dans tout le corps… mais il ne peut pas s’arrêter… s’il cesse de courir, on le tuera !

Soudain, un tir atteint sa jambe droite, le projetant au sol… la douleur est telle qu’il en pleurerait. Il n’a jamais connu de souffrance aussi vive... et pourtant, il lui faut se relever. Ou bien la prochaine balle risque de le tuer… Chaque pas est une torture, et il ne peut que boiter, mais il continue… Le voilà à présent au milieu de la foule… il lui faut se faufiler dans une ruelle pour se cacher… il a besoin de repos… Il sait que son assaillant est tout prêt… mais s’il ne s’arrête pas, la fatigue le tuera… Se précipitant dans une ruelle sur sa droite, il se jette dans une benne à ordures, et se cache sous les rebuts, s’en recouvrant autant qu’il peut…

Il entend des pas se rapprocher, et se prend à prier…



A suivre

2 commentaires:

  1. Pour le moment, le passage du journal de Potiron est l'un de mes préférés, bravo c'est très bien écrit, ça fait très roman d'espionnage et on se demande si Potiron n'est pas parano mais perso je ne le crois pas une seconde

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  2. Je suis content que ça t'ait plu. C'est un des passages les plus importants alors si on sent bien la pression monter, j'ai atteint mon objectif!

    Plus que 2 chapitres, les choses vont se précipiter....

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